jeudi 5 mai 2016

Histoires de Feux

J'ai une cousine, Zigzag Jones, présentement en fuite forcée à Fort McMurray, roulant vers le Nord, vers Boyle, jusqu'à ce que la voiture d'elle et de son chum manque d'essence car ils n'en ont pas assez et ne pourront refaire le plein dans le giga-trafic de la seule route du secteur.

Ils finiront par l'abandonner comme le font les personnages de Walking Dead.

Cette route force la circulation à quelques pieds à peine du violent feu de forêt qui fait rage. Les images qu'elle nous envoie font frémir. Ils n'ont eu que 30 minutes pour rassembler les choses les plus importantes qu'ils avaient chez eux. Ils ne savent pas ce qui se passe avec leur maison, mais ont su que la maison d'en face a complètement été rasée par le feu. Ce qui laisse croire que la leur aussi.

Depuis que l'Homme utilise le bois dans ses constructions, les feux ont fait partie d'un processus d'apprentissage dans la sécurité nationale. Les enfers incendiaires ont été si communs au travers des temps que la plupart des grandes villes du monde ont d'abord été rasées au moins une fois par le feu, avant d'être rebâties par la suite. Une ville comme Constantinople a brûlé pas moins de 5 fois. New York a brûlé gravement en 1776 et en 1835. Amsterdam en 1421 et en 1452. Moscou, 4 fois entre 1547 et 1812. Copenhague en 1728 puis une autre fois en 1795. La Nouvelle-Orléans (vous croyiez qu'ils n'avaient pas déjà assez de problèmes naturels là-bas?) en 1788 et en 1794.

À plusieurs reprises, ces incendies ont été causés par l'Homme, mais ils furent aussi le résultat de la guerre et très souvent simplement causés par la nature. Des constructions mal pensées, des produits et du matériel trop inflammables et le manque d'habileté à lutter contre de violents incendies ont tous contribué à causer de graves catastrophes urbaines.

Voici quelques rappels incendiaires des années derrières.

Boston. 1872.
776 édifices, 65 acres de la ville, une vingtaine de personnes réduites en cendres, l'incendie de Boston a ruiné le secteur des affaires ainsi que la basse-ville. Les dommages étant si grands que plus d'une douzaine de compagnie d'assurances ont alors dû déclarer faillite. Une comédie d'erreur a mené à cet incendie majeur en commençant par un ordre nouveau de barrer les boites d'alarmes d'incendie afin de prévenir les fausses alertes ainsi qu'une diminution de la pression d'eau dans la ville, en plus d'avoir des bouches d'incendies non conformes, ne s'appliquant pas partout en basse-ville, empêchant les pompiers de travailler convenablement.

Londres. 1212.
Le London Bridge était fait en bois résistant à l'eau, mais hautement inflammable. Le feu y commence. À Southwark, c'est autour de 3000 personnes qui ont trouvé la mort dans un violent incendie laissant le tiers de Londres en ruines. La ville a été ravagée par le feu au moins 6 fois entre 1130 et 1666. Prouvant qu'on n'apprenait alors pas de ses erreurs. Il devait être plutôt difficile de se magasiner une assurance incendie à Londres à cette époque.

Londres. 1666.
Bâtie principalement en bois, la ville était une véritable niche à feu. Cet incendie a été étrangement bénéfique pour la ville. En effet le secteur ravagé était le secteur précis où la peste noire avait sévi. De plus, malgré le grave ravage, il n'y eût que 6 décès dans les flammes. Celles-ci auraient eût comme origine le four d'une bonne dont la puissance aurait été mal dosée.

Rome. 64.
Selon l'histoire, ce sont 5 jours de feu qui ont ruiné 10 des 14 districts de Rome. On a soupçonné que Néron était à l'origine du feu afin de faire le ménage parmi les chrétiens en les persécutant. On a aussi dit qu'il voulait se faire reconstruire de nouveaux palais et une toute nouvelle architecture pour sa ville. On a aussi prétendu qu'il se moquait tant de l'incendie qu'il jouait des airs de violons pendant la combustion. Ce qui est faux, le violon n'étant alors pas encore inventé. Néron avait beaucoup d'ennemis et on a inventé toute sorte de merde à son sujet. Ce qui reste vrai c'est qu'il s'est bâti à même les ruines, un immense palais qui mènera à sa chute.

Chicago. 1871.
En Octobre, 17 000 structures ont été touchées et 90 000 résidents sont devenus sans-abris. Heureusement, le feu s'est propagé relativement lentement, ce qui n'aurait causé que quelques 300 morts. Mais l'hiver s'en venait, et plusieurs autres ne le survivraient pas sans logis. Le feu aurait pris son amorce dans la grange du 137 DeKoven Street. On prétendit qu'à l'origine du feu se trouvait une vache qui aurait donné un coup de pied par inadvertance sur une lampe à l'huile. La ville se releva brillamment en mettant sur pied des mesures de préventions d'incendies et un service de pompiers si efficace, systématisé et allumé qu'il a servi de modèle pour l'Amérique du Nord en entier par la suite.

San Francisco. 1906.
Aux aurores du 18 avril, un tremblement de terre frappe la ville côtière. 25 000 édifices, 490 structures locatives et 3000 morts seront causés à la fois par l'Homme et la nature. En effet, les pompiers sont affreusement sous-qualifiés pour lutter contre l'incendie qui est causé par le tremblement de terre. La corruption est totale à City Hall et les fonds pour l'équipement et la formation des pompiers ont été détournés par la mairie. Le tremblement de terre a complètement démoli le réseau d'aqueduc, alors l'approvisionnement d'eau est inopérable. Les pompiers dynamitent des buildings en parfaite condition afin de provoquer des obstacles de poussières qui freineraient les flammes. On dit que la moitié des pertes de structures auraient été causées par la mauvaise gestion du dynamitage, largement inutile par moments. De plus, l'homme qui savait coordonner tout ça, le chef des pompiers Dennis Sullivan, est décédé dès le départ par le tremblement de terre, laissant les pompiers improviser dans le chaos. Mauvaise journée pour la ville dans la baie.

Peshtigo. Wisconsin. 1871.
Au même moment que brûlait Chicago, la beaucoup plus discrète et rurale ville de Peshtigo au Wisconsin brûlait aussi. Une tornade aurait été à l'origine de l'incendie. 17 000 personnes périssent dans les flammes et comme un des unique moyen de s'en sortir est de se tirer dans la rivière et qu'en octobre, l'eau y est excessivement froide, les morts se multiplient par noyades et par hypothermie.

Texas City. 1947.
Une explosion industrielle survient dans une réserve de 2300 tonnes d'engrais à base de nitrate d'ammonium. Les pompiers combattent l'incendie mais une seconde explosion, encore plus violente que la première, tue l'ensemble des pompiers combattant le feu et fait tomber plus de 1000 structures avoisinantes tuant 600 autres personnes et en faisant tout simplement disparaître un paquet d'autres. La seconde explosion, dans un quartier industriel provoque une réaction en chaîne qui fait aussi exploser des raffineries et des installations chimiques dans un carnage qui ne semble plus avoir de fin. La seconde explosion est si massive qu'on en sent les vibrations aussi loin qu'en Nouvelle-Orléans (400 kilomètres plus loin) tandis qu'à Houston (65 kilomètres plus loin), des fenêtres se fracassent. L'explosion a même fait s'écraser un avion qui passait par là. Horreur texane.

Halifax. 1917.
Le 6 décembre, la Première Grande Guerre fait rage. L'attention est donc partout ailleurs. Quand le cargo Mont-Blanc décharge sa livraison de munition dans l'effort de guerre, il entre en collision avec un transporteur norvégien provoquant un incendie qui gagnera vite le chargement de munition, des kilotonnes de TNT, et qui culminera dans une explosion si immense qu'elle provoque un mini-tsunami dans le port. Des arbres sont déracinés, et pour rendre les choses plus compliquées une tempête fait rage dès le lendemain amenant le total de morts à plus de 2000 et laissant près de 10 000 blessés lutter contre le mal. Le port d'Halifax sera inutilisable pendant plusieurs années par la suite. La nouvelle est carrément censurée dans l'actualité afin de ne pas donner une impression d'inefficacité aux Européens et aux Étatsuniens que le Canada veut aider.

Tokyo. 1923.
Un important tremblement de terre secoue d'abord la ville sur l'heure du midi. À une heure donc, où des centaines de restos cuisinent. Ceci causent sur-le-champs de multiples foyers d'incendie. Un typhon sévit presqu'au même moment propageant les flammes à une vitesse éclair et semant la panique générale. 38 000 chinois se regroupent à l'exact même endroit et plusieurs meurent étouffés avant même de se faire réduire en cendres. Le tremblement de terre provoque aussi un tsunami qui avalera 570 000 maisons. laissant près de 2 millions de chinois sans abris. On parle au total de 142 000 morts. La ville se reconstruira pour se faire à nouveau brûler par les bombes B-29 des États-Unis dans la Seconde Grande Guerre.

Je pense très fort à ma petite cousine Zigzag et à ses proches,

Facebook a une vraie utilité dans des moments comme ceux-ci.

Qu'elle nous écrive sans relâche.





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