Ça m'a un peu agressé, car je devrai tout recommencer. Pas grave. J'ai répondu.
Un lourd accent haïtien m'attendait à l'autre bout de la ligne, une femme:
"Bonjour, est-ce que je peux parler à madame Hunter Jaune s'il vous plait?"
"C'est elle" répondis-je, avec ma voix de baryton.
"Er...Madame?..."
"En chair et en os mais surtout bien en chair" ai-je ajouté
"Oh...donc c'est monsieur Hunter?..."
"OH QUE NON! je suis bien femme!"ai-je insisté en gardant ma voix de baryton.
Elle a hésité, des mots incompréhensibles se sont précipités dans sa bouche qui a fini par rire un peu, clairement de nervosité. puis elle a dit:
"O.k....o.k....j'appelle du bureau du candidat du parti Libéral de Monsieur Trudeau, le candidat Libéral dans votre secteur est Gemme Lay Crosstotons, peut-on compter sur votre vote le 19 octobre prochain?"
"Certainement pas"
J'ai dit ça comme on aurait grondé un enfant. Mais c'était vrai. Trudeau, jamais.
"Oh..er..o.k...d'accord"
Comme j'avais été honnête, (enfin presque, j'ai un pénis) elle s'est sentie obligée de l'être elle aussi.
"Vous savez je suis extrêmement sous payée pour faire ce que je fais, vous n'avez pas besoin..."
Je l'ai coupée, elle me dérangeait dans mes redressements assis.
"DE VOUS répondre? c'est vrai. Bonne journée!" et j'ai raccroché.
J'ai repris mes redressements assis. 150, très bien merci. Le téléphone a sonné à nouveau au 102ème.
Calisse. Pourquoi faut-il appeler autant quand je suis tout seul à la maison.
J'ai répond.
"Quon?"
"Bonjour madame Twinling Fonglong?"
"Elle n'est pas à la maison"
"Oh! Monsieur Hunter Jones, pardon!"
"On fait belles rimes en "on"
"Pardon?"
"Citron"
"..."
"Marmiton"
"Monsieur Hunter Jones, ici le bureau du candidat conservateur du parti de Stephen Harpon patapon..."
"Étron"
"...peut on compter sur votre vote pour le député de votre région..."
"Gigon"
"... Per Dumont-Pentalon..."
"Caleçon"
"...le soir des élections?"
"Non!"
"O.K. est-ce que je peux vous poser une question?"
"Envoyez-donc!"
"Qu'es-ce que vous voudriez améliorer dans la prochaine administration?"
"Qu'on ramène tous les budgets coupés pour la traduction"
"Ah...o.k...On ne l'avait pas eu celle-là, c'est bon"
"Je vous laisse j'ai des exercices à terminer dans le salon!"
"Merci monsieur et rappelez-vous, Dieu est bon"
"Pas dans sa gestion des cons" et j'ai raccrochon.
Faudrait quand même me sacrer une petite patience. J'ai repris mes redressements assis.
150, très bien merci. le téléphone a sonné au 87ème.
"Bonjour monsieur Potvin, Jean-Georges Lalicorne, candidat du Bloc aux prochaines élections, vous allez bien?"
"Je ne suis pas monsieur Potvin"
"Ah non?, vous êtes qui?"
"Éric Salvail"
"Eri?...Le gars de la télé? Le fif?"
"Vous faites souvent de la discrimination comme ça, monsieur Louis-George?"
"HEIN? nonon, non, non, je.non, je, non, je...non"
"Vous voulez savoir si je vais voter pour vous la semaine prochaine?"
"ouais, ouais, ouais, ouais, ouais"
"Non, non, non, non, non, non"
"Ah ben qu'est-ce qu'on peut faire pour vous faire changer d'idée, monsieur Salvail?"
"Savoir mon nom, je ne suis pas Eric Salvail, je suis Hunter Jones, sachez à qui vous vous adresser"
"Hunt...Jones? c'est anglais?"
"Irlandais. Je suis irlando-atikamecq en fait"
"Et...et un étranger comme un orlando-antikébec, ça peut tu voter Bloc? vous parlez bien français pourtant..."
"Je raccroche encore mieux en français"
Et j'ai raccroché.
Redressements assis, ostie. 150, très bien merci. Au 111ème, le téléphone.
J'ai changé de couleur chaque fois:
"Bonjour est-ce que je vous dérange?"
"Oui je tente de faire mes redressements assis, mais le téléphone coupe mes exercices chaque fois"
"Je serais alors très brève, je représente le bureau de la candidate élue Sandra Contour du NPD et je voulais savoir si on peut compter sur votre appui le soir des élections prochaines?"
"Elle a un chum et un enfant, monsieur Jaune"
"Et moi une blonde et deux enfants, 2-1 pour moi"
"Vous voteriez donc orange, monsieur Jaune?"
"Orange est ma couleur préférée"
"Vous savez qu'on est drôlement exploités à faire des coups de téléphones comme ça, bénévolement, le saviez vous?"
"Je sais, on dit de votre patron que c'est de la graine de dictateur. Vous êtes de plus probablement de ma génération, donc formatée pour les travaux ingrats"
"Alors on pourra compter sur vous monsieur Jaune?"
"DJones, DJJJJ, DJJJJJJJJJJ! DCHJONZ!"
"D'accord, d'accord, d'accord, merci de votre patience, monsieur Shawns, bons redressements assis"
Au moins, on s'était tous parlé franchement.
Rare en politique.
Très bien, merci.
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