lundi 3 mars 2025

Fantômes du Bostian Bridge

(à la mémoire de mon grand-père maternel, travailleur des rails, et connu seulement en photos)

Le 27 août 1891, la locomotive à vapeur 166 du train #9 de la Richmond & Danville Railroad quittait la gare à 2h30 du matin avec 5 wagons à l'Ouest de Statesville, en Caroline du Nord. Un wagon de bagages, un autre de lits, avec des couchettes, un de passagers de première classe, un autre de passager de seconde classe et le wagon de tête comprenant la cabine privée du chauffeur. Le train était 34 minutes en retard et roulait autour de 65 km/heure. Donc un peu plus vite que d'habitude afin de rattraper le retard.


 
Le train n'était parti que depuis 5 minutes et devait emprunter le pont Bostian, en pierre, long d'une soixantaine de mètres. C'est tout juste avant d'embarquer dessus qu'il a complètement déraillé, plongeant 153 pieds plus loin par en bas, et tuant 23 personnes. Comme Statesville n'avait pas d'hôpital, on a dû réunir les cadavres pour identification dans un entrepôt de tabac tout près et les blessés ont temporairement trouvé confort dans des résidences privées le temps que les ambulances arrivent. 

L'enquête confirmera qu'un sabotage de la rail de la part d'on-ne-sait-pas-qui aurait causé le déraillement d'un chemin de fer déjà très mal entretenue. Les familles ont bien tenté de poursuivre la compagnie de chemin de fer R & D sur ce qu'ils qualifiaient de possible négligence, mais celle-ci était comme Postes Canada de nos jours, très mal en point financièrement, ils ne pouvaient pas vraiment payer quoi que ce soit à quiconque.   

La suite est plus intéressante. 

Au premier anniversaire du drame, on raconte qu'on y aurait entendu le crissement des roues du train et les cris d'horreurs des passagers dans la nuit. Que le fantôme d'un employé égaré, avec une montre de poche en or à la main, y aurait été vu. Que ce serait l'esprit de Hugh K. Linster, maitre bagagiste, retrouvé le cou cassé dans les décombres du train.  

Au 50e anniversaire de la catastrophe, le 27 août 1941, une femme attendant près de la voiture près du pont, alors que son mari était parti chercher de l'aide dans un commerce des alentours parce que leur voiture avait une crevaison, dit avoir entendu un très clair système de freinage métallique en provenance du pont, des cris, des pleurs et des plaintes de gens blessé provenant d'une sorte de fracas de bois que ni le mari, ni le travailleur du commerce, à leur retour n'ont pu valider. 

Année après année, à cet endroit, des curieux se sont pointés à cet endroit afin de peut-être y voir ou entendre le fantôme du train et de ses passagers. Pendant un certain temps, on faisait aussi exprès pour faire de cette nuit une sorte d'évènements afin de tenter de faire sortir les fantômes, en produisant du son et de la lumière pouvant évoquer la catastrophe du train à l'heure précise où ça s'était déroulé, entre 2h30 et 3h00 du matin, dans la nuit du 26 au 27 août près du pont. 

En août 2010, au 119e anniversaire, une douzaine de "chasseurs de fantômes" se pointent justement à cet endroit, mais se placent illégalement sur les rails du train, sur le pont. Quand on voit une lumière de train dans la nuit, on prend un peu de temps à comprendre que ce n'est pas l'effet d'un amuseur du coin et que le chemin de fer n'est pas aussi abandonné que d'abord cru. En effet, le hasard veut qu'un train y passe justement entre 2h30 du matin et 3h00. Tout le monde réussit à se tirer du chemin, mais pas Christopher Kaiser et l'amie avec lequel il est venu. L'homme de 29 ans court les 50 mètres du pont à courir et quand il voit qu'il n'y arrivera pas, pousse son amie qui fera une chute d'une douzaine de pieds, mais survivra.

Pas celui qu'elle retrouve quelques pieds plus loin, Christopher, frappé de plein fouets par le train Norfolk. 

Mort en héros.

Mais aussi, nouveau fantôme un peu poche.  

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