Maya était en avion depuis plus de 2 heures. L'homme à ses côtés, buvait son bloody mary. Elle avait tenté de démarrer une conversation avec lui, mais n'arrivait pas à trouver une bonne raison de le faire sans brusquer sa quiétude. Elle choisit alors de briser la glace tout de même et de lui demander son nom.
"Votre visage me dit franchement quelque chose, travaillez vous dans le monde de la musique par hasard?"
L'homme sourit.
"Justement, oui. Je suis directeur de l'école nationale de musique de Vienne, c'est drôle que vous me demandiez cela, madame?..."
"...Mulvane. Maya Maulvane. Dit-elle. J'ai autrefois été madame Polski, parce que mariée, mais c'était une autre époque...il y a longtemps..."
"...Un mariage qui n'a pas duré si je comprends bien?" dit l'homme, presque flirtant.
"L'amour peut s'éfilocher parfois" dit-elle, un brin gênée par la direction de la conversation. Elle voulut tout de suite changer de sujet. "Je suis pianiste, moi-même, accompagnatrice principalement."
"Et vous le faites bien" dit l'homme.
"...pardon?"
"Vous savez bien accompagner, je n'en doute pas, vous le faites présentement assez bien avec un pauvre homme seul avec son verre dans un avion." Cette fois, il flirtait peut-être. Elle rougit. Puis, après un silence, l'homme resta saisi un instant.
"Pol...Polski?...C'est un nom d'origine Autrichienne? Polonaise? Slave? j'ai connu un Polski il y a longtemps. Oh! le pire des chanteurs que j'ai eu la malchance d'entendre en audition... il s'appelait en plus Paul Polski, son nom était presque un roulement de batterie accompagné d'un coup de cymbale! Polpol ski! polpol ski! ça ne s'oublie pas ne pas avoir d'oreille comme lui et pourtant avoir un nom aussi rythmé..."
Maya était saisie. "Mais...Paul Polski était le nom de mon mari! et il était chanteur!"
Un ange avec une enclume sur les épaules passa entre eux deux.
"On ma pauvre dame...oh ma pauvre dame...dit l'homme, je crois avoir été particulièrement brutal avec lui en audition, vous étiez mariés en 1983?"
"Oui"
"Avec lui?"
"Mais vous me prenez pour une noceuse? bien sur avec lui!"
"J'espère qu'il n'en a pas trop souffert par la suite...je ne sais pas quoi vous dire, c'est le pire chanteur que je n'ai jamais entendu en audition, ça ne s'oublie pas, et je lui avais fait savoir assez sauvagement..."
"Il en a beaucoup souffert, oui...mais pas autant que quand je l'ai trompé..."
"Oh!..." l'homme, par pudeur, s'interdit de creuser le sujet.
"...avec son meilleur ami en plus... c'est la raison du divorce..."
Un nouvel ange, madrier de plomb sur les épaules, les survola tous les deux. Une femme dans la rangée d'en avant vint s'imposer dans le moment.
"Désolée, je ne pouvais m'empêcher de vous entendre parler de ce M.Paul Polski que je crois aussi avoir connu"
Les deux autres restèrent stupéfaits.
"Oui, j'ai bien peur que ce soit aussi dans des circonstances malencontreuses, j'étais bibliothécaire et j'ai servi comme témoin, en 1995, dans un procès contre lui, il...il était accusé de mauvaise conduite sexuelle et...enfin...j'ai été appelée à témoigner qu'il avait emprunté des livres extraordinairement sexuellement tordu à la bibliothèque..."
"Je ne sais pas si on parle du même Paul Polski, mais j'ai joué au hockey avec un Paul Polski et il était une vraie nuisance, je lui ait fait savoir plus que quiconque!"
Un autre homme, plusieurs rangées plus loin s'interposa aussi.
"PAUL POLSKI! c'était le nom de mon souffre-douleur à la petite école primaire!"
"Moi je pense avoir déjà fait chanter un Paul Polski avec des photos de lui plutôt compromettantes..." dit un autre homme.L'avion eût à ce moment une importante turbulence qui en fit crier quelques uns qui s'étaient levés pour parler.
"Comment avez vous obtenu vos billets d'avion?" demanda le premier homme au bloody mary maintenant consommé.
Tout le monde était unanime. Tout le monde s'était fait payer son billet par quelqu'un qui leur promettait le plus salvateur des voyages.
C'est à ce moment qu'une agente de bord, terrorisée, sortie du cockpit et s'adressa à tous les passagers.
"MESDAMES ET MESSIEURS, JE SUIS MADELEINE, J'AI COUCHÉ AVEC LE PILOTE, MAIS JE SUIS MARIÉE, ET QUAND IL A INSISTÉ POUR QUE JE QUITTE MON MARI POUR LUI ET QUAND J'AI CESSÉ D'ACCEPTER NOS PETITS JEUX AU LIT, IL S'EN EST TROUVÉ TERRIBLEMENT OUTRÉ."
"Et alors? qu'esT-ce que ça peut nous faire?" demanda quelqu'un.
"LE PILOTE EST PAUL POLSKI, IL VOUS AS TOUS CHOISI, A PAYÉ TOUS LES BILLETS ET NOUS ALLONS TOUS MOURIR CAR IL FONCE PRÉSENTEMENT VERS LE SOL!"
L'effroi n'eût pas le temps de gagner tout le monde. L'explosion ne laissa aucun survivant.
Polski, bien que mort, est mort vengé.
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