jeudi 29 mars 2018

L'Océan Nous Électrocutera Tous

"I don't Belong here...I don't belong here..."
- T.Y., M.H., J.G., C.G, A.H, E.O, P.S

Y a de ses jours.

C'était mardi. Journée intense sur la route. Je parcours en moyenne 236 kilomètres entre Contrecoeur et Brossard, les mardis. Mes journées commencent autour de 5h39 et se terminent autour de 19h11. Pourquoi si précis? Parce que je me rappelle de mardi dernier. En MOYENNE 236 kilomètres, donc bien souvent, je fais plus. Mardi dernier: 295 km. C'est pas la route le problème, c'est de rentrer et sortir du camion, se salir les mains comme c'est interdit, Sortir la moitié de ce qui a dans le camion à chaque stop pour aller chercher ce qui traîne dans le fond, qu'on doit livrer. Le rerentrer dans le camion.

Bon, bon Jones, tu nous feras pas pleurer, tu travailles au moins, et personne ne te force à faire ce que tu fais. Je sais. Mais les mardis, j'ai appris à les haïr depuis l'automne. C'est le prix à payer pour travailler 4 jours par semaine. Pas de larmes là non plus, je sais. Je ne me plains pas. Je suis crevé, c'est tout. Et j'ai un volant. Et parfois, comme mardi dernier. Ça m'inquiète. La pénibilité des mardis serait trop intense et insupportable pour tant de gens, alors pourquoi moi je...? enfin...

J'ai une meilleure veste pare-balle, je présume pour ce que la vie nous balance.

À la radio, Catherine Perrin ne m'intéresse presque plus les mardis. Ce mardi, pas du tout. Quand elle a annoncé Leslie Chesterman et Pierre Gingras j'ai décroché. Je n'ai rien contre les deux, mais ce qui les intéresse ne m'intéresse pas souvent. Et ce mardi-là, pas du tout. J'ai donc enfilé une liste de lecture de mon cru tiré de mon Iphone. Et dans la fatigue du mardi matin dans le 450 du sud, où on avait oublié de me mettre 5 articles dans le camion, ce qui crééraient autant de mécontents et me plongeait dans le marasme absolu, je me suis créé un joli moment.

J'ai chanté Creep de Radiohead, en toute humilité, avec perfection. Mieux que Lana Del Rey. Mieux que The Hollies. Entièrement. Avec l'intensité de Thom et les pitchs placés aux bons moments. Je me suis beaucoup impressionné. À chanter au volant, j'ai appris à devenir ventriloque. Toutefois dans les champs de St-Amable, je suis pas mal seul. Et j'ai chanté avec panache.
J'aurais aimé qu'il y ait des témoins. C'était un très beau moment sonore. C'est vrai qu'on ne s'entend pas comme les autres nous entendent, mais pendant toute la chanson, nos voix étaient à l'unisson. Intensément. Bien calibrées. Même si je ne suis pas creepy du tout...je pense...

J'avais un moment. Comme Margaret et Anthony Armstrong-Jones dans la saison II de The Crown, épisode 7.

Je communiais là où Catherine Perrin avait failli à créer quelque chose à la radio. Quand le morceau suivant a enchaîné, je suis redevenu existentiel. How Do You? Cette absence de finition de phrase grammaticale anglaise me plait. Ça rend le moment... existentiel. Comment peux tu? Je me pose justement cette question chaque mardi matin quand je pars dans une journée trop lourde au volant d'un camion trop petit pour ce qu'il contient. Pour un homme trop vieux pour jouer au gamin.

Quand la musique a glissé vers un troisième morceau, le soleil s'est pointé dans le froid du jour. Je crois qu'avec le lourd camion j'ai volé. J'ai plané sans même la cannabis. I bet you think that's pretty clever, boy.

Puis, la quatrième chanson m'a fait verser une larme. À 2:32 de la chanson. She looks like the real thing, she tastes like the real thing. My fake plastic love. 

J'ai alors réalisé pourquoi j'aimais tant Margaret dans la série The Crown, de Netflix. Elle me rappelle une ancienne amoureuse du début des années 90. Dont l'actrice qui joue Margaret, Vanessa Kirby, a beaucoup des traits. Et de la personnalité. Cette copine venait de Brossard, justement. Ce qui condamnait notre relation d'emblée.

Si je pouvais être celui que tu voulais.

Si j'avais pu être celui que tu voulais.

Tout le temps.
Tout le temps.

Si fataliste.

Y a de ces bands...

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