La Plus Grosse Larme d'Amérique

Je ramassais les feuilles sur le terrain. J'aime tant ramasser les feuilles, ça me détend complètement.

Je fais le terrain du voisin tellement j'aime ça.

J'avais dans les oreilles un nouvel inséparable ami. Totalement B.A.D. (Born Again Dylan) Dylan réincarné. Il a même eu le culot de se faire une Ballad of Mr Jones* qui n'est même pas celle de Zimmerman. Ce clin d'oeil n'est pas innocent , il doit bien savoir qu'il sonne comme le maître. Parlant de clin d'oeil, j'ai même décidé, avec les deux pochettes enlignées côte à côte dans ma voiture, que Jake Bugg et Lana Del Rey feraient un jour des bébés ensemble et qu'ils seraient (après les nôtres bien entendu) les plus beaux de la terre.

Rendu à la chanson 7, Bugg m'avait vaincu, je suis devenu 100% softy et je rêvais de flocons. J'entendais presque Philippe Noiret de sa voix de baryton dire "L'homme qui ramassait les feuilles". J'avais alors encore moins à voir avec tous ses gens dans ma rue du 450 qui sont penchés les week-ends sous/sur leurs voitures. C'est un sport gosser sur son char dans mon coin. J'appréhende le jour où un policier viendra sonner à ma porte pour me signaler que je n'ai pas passé le 6 heures réglementaires à faire n'importe quoi sur ma voiture.

"Est-ce que écouter de la musique dedans pas trop fort ça compte, monsieur l'agent?"

J'avais ouvert le garage pour rentrer mes articles "d'homme de terrain". Quand la porte s'est ouverte un grand cri de l'amoureuse a éveillé toute la rue.

AAAAAAAAAAAAHAYE!

Elle était en petite culotte et portait des bottes(fait froid sur le plancher du garage). Elle venait y chercher quelque chose, je ne sais trop quoi. Elle sortait visiblement du lit et avait presque le look de Lena Olin dans The Umberable Lightness of Being.

Je ne sais pas pour vous mais moi, quand je ne veux pas attirer l'attention sur ma personne, je ne fais pas en sorte d'ameuter tout le quartier d'un hurlement hystérique. Je me pousse le plus discrètement possible. Et ce n'est pas comme si tout le monde avait déjà son attention sur ma personne, ils vaquaient tous dans la rue sur des voitures dont ils semblaient redécouvrir la carrure jour après jour. Toutefois maintenant, ils avaient tous une raison de s'intéresser à notre garage. Ils avaient même des images stimulantes pour faire de l'objetcophilie.

Moi mes week-ends je les passe partiquement sans toucher à ma voiture. Je les passe comme dans un vidéo d'Edwyn Collins.

Celui-là, ce week-end là, où on gagnait une heure de dodo, la belle et moi on a écouté un film. Un film au casting formidable. Avec des personnages parfaitement imparfaits. Une quinzaine au moins. Formidable, formidable casting. On se surprend à aller revisiter les carrières de chaque interprète par la suite.

On se surprend aussi à pleurer. Au beau milieu du film, je ne révèle aucun punch rassurez-vous, il y a cette jeune fille qui accouche d'un bébé du viol. Déjà, c'est extrêmement lourd la simple idée d'un bébé du viol. Portez une si amoureuse petite chose en soi et savoir que c'est aussi le fruit de l'horreur...ouf...Mais quand en plus cette merveilleuse petite créature est prématurée et morte née...Ayayaye...Je crois avoir versé la plus grosse larme d'Amérique.
À l'écrire, j'en verse une autre dans un tremblement.

Un vrai grand film qui bouleverse.

On a pensé à des amis, qui n'ont pas connu le viol mais qui ont connu la perte d'enfant. C'est une scène relativement hors de la trame narratrice principale du film qui par ailleurs, offre un véritable bal des difformités sexuelles impardonnables, mais nous, ça, ça nous as crevé les deux yeux. Une scène entre autre qui nous présente (la fantastique)Marina Foïs seule devant la petite, presque déjà devenue chose, éteinte.

Et la fin de ce film est digne du chef d'oeuvre.
La force mentale pour faire ce métier,
le contraire,
une victime couronnée...
Ça reste en tête longtemps.

Maïwenn et Emmanuelle Bercot, actrices, adaptatrices, dialoguistes et scénaristes du film (réalisatrice aussi pour la première) nous ont bien chaviré, les maudites.

Maudites parce que c'est quoi l'idée de pleurer un samedi?

J'ai dis à la belle de mettre ses bottes et ont est allé construire ensemble un monde plein d'enfants. Pour concurrencer les futurs bébés de Jake & Lana. On ne réécrira pas les samedis soirs tout de même.

Je pourrais peut-être passer mes week-ends dans/sur/sous mon char moi aussi.
À écouter Jake, Lana ou Bob.

(...)

Écouter Jake, Lana et Bob, oui.

Gosser su' mon char?...
Nooooooooooooooooooooooot!
Faire des bébés oui.
Chériiiiiiiiiiie?...
*Comment ne pas se sentir interpellé?