mardi 27 avril 2010
Neige
Je dois habiter le seul coin du Québec où dans le même 24 heures ont peut passer la tondeuse et déneiger son entrée.
On a eu tant de neige que nos arbres (feuillus) penchent chez le voisin sous le poids de la neige.
Sur Jean-Brillant, la rue de mon pavillon universitaire, un pauvre malchanceux a vu la fenêtre arrière de sa voiture se faire fracasser par une immense branche devenue trop lourde par l'innatendue neige.
Les arbres qui penchent chez mon voisin sont du côté du voisin bourru bien entendu. Celui qui fait des phrases sans verbes.
"ouin...tes arbres..." M'a-t-il dit en fin de soirée.
Homme de grammaire, je lui ai laissé le temps de se structurer un verbe et peut-être même un complément d'objet direct si il se sentait inspiré.
"Ouin...ta haie..." a-t-il préféré renchérir en reniflant si fort que j'ai d'abord cru que sa morve venait de faire ploc! dans sa calotte crânienne.
Avec la neige qui s'accumulait à un rythme de Février ma tête de plouc me faisait les cheveux tout mouillée collés sur la face. De loin, avec mes sacs d'école sur le dos, je devais avoir l'air d'un ado qui parlait avec son père.
Le voisin bourru a laissé tomber un grognement de loup puis ila dit:
"...la neige..." (N-É-G-E)
Je vous jure, Jacques Martin passe pour Oscar Wilde à ses côtés.
"Ouin ben...je vas peut-être secouer les arbres, je sais pas trop, ça tombe encore pis ç'est annoncé comme ça toute la nuit."
Il m'a regardé me demandant de ses gros yeux "tu vas faire ça tu suite là?" sans jamais en prononcer les mots.
"Oui" J'ai dit à une question qui n'avait jamais été posée.
"Oui quoi?" Il m'a dit, sans verbe toujours.
"Oui ben c'est ça" je lui ai dit, m'offrant le luxe de lui soustraire un subjonctif explicatif.
"Maudite météo!" a-t-il craché ajustant son toothpick dans ses dents tout en dévoilant un peu de sa bedaine de bière. Ce n'est que là que je me suis aperçu qu'il était en robe de chambre, camisole en dessous, pantoufles aux pieds. Moi qui voulait me plaindre de mes espadrilles toutes mouillées, j'en perdais soudainement le droit.
Un ange dispersant des tonnes de confettis mouillés/mouillant est passé. Lissant davantage mon cheveux fin dans ma face fatiguée.
J'ai coupé le silence.
"Bon ben, moi je rentre je suis tout détrempé"
"Ouiiiiiiiiiin..." a-t-il laissé trainer sur le ton du gars qui dirait "essaye-donc voir". Ça m'a un peu freiné. Le regard que je lui ai lancé était presque une demande de permission de m'en aller.
Ce n'est qu'au haut des marches qu'il a attendu pour me donner sa première phrase complète:
"Tu diras à ton père qu'ils viennent secouer ses arbres!"
J'ai voulu lui répondre que mon père était mort mais c'est là que je réalisai qu'il me prenait pour mon fils! 27 ans plus jeune! C'est sur que j'ai maigri, c'est sur que j'avais un sac d'écolier sur le dos, c'est sur que ma coupe de cheveux ne rendait justice à personne, mais quel enfant revient de l'école à 22h00? Monkee ne conduit pas ma voiture et il m'avait bien vu entrer dans l'entrée et sortir de ma petite machine.
Je lui ai lancé un long regard du haut de marches et il avait soudainement l'air de la galerie d'une petite boulette de ragôut de boulette perdue dans les patates pilées. J'ai essayé de prendre une voix de Bart Simpson pour lui dire:
"O.K. boss! mais demain à c't'heure là y dort!"
Il m'a gratifié d'un long rot intérieur qui fût si puissant que l'odeur de boisson pré-digérée s'est tout de même rendue jusqu'à ma porte 15 marches plus haut.
Il a marmonné quelque chose comme "que dalle" ou "pédale".
La première est trop sophistiquée pour lui. Il a dû dire "pédale"
J'ai beau avoir deux enfants, jouer et coacher au hockey, mépriser Justin Timberlake ce voisin semble convaincu que je joue pour l'autre équipe.
Désolé vieux, trop de femmes à conquérir.
Je suis allé me coller sur ma belle dans les draps qui ma jeté en bas du lit.
Trop mouillé.
Elle pas assez anyway.
La neige ce ne sera que dehors ce soir.
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