samedi 3 avril 2010
Bison Ravi
Les connections sont étrangements nombreuses entre Boris Vian et moi.
Je n'ai pas la prétention d'avoir le centième de son talent toutefois.
Boris a été trompettiste comme moi. Amoureux du jazz comme moi. Amoureux de la plume comme moi. Traducteur comme moi. Scénariste comme moi et la belle lui a même trouvé un air de famille physiquement avec ma tronche...
Toutefois ce fou heureux est né en 1920 un jour de grêve des infirmières et est mort à 39 ans un jour de grève des croques-morts. Aussi bien dire qu'on ne voulait de lui nulle part.
(Un peu comme moi aussi...:)
À 12 ans, Boris est victime d'un rhumatisme articulaire aigu, qui lui occasionne une insuffisance aortique. Cette maladie du cœur, dont ses œuvres porteront la trace, en fera la cible de l'affection trop étouffante de sa mère. Il en parlera dans L'Herbe Rouge, et plus encore dans L'Arrache-cœur.
Sa scolarité est souvent interrompue en raison d'accidents de santé. Il profite de ses instants de liberté pour écrire et jouer de la musique jazz. Il se marie en 1941.
Il fréquente les cafés de Saint-Germain-des-Prés : café de Flore ou des Deux Magots, à l'époque où ceux-ci rassemblent intellectuels et artistes de la rive gauche : Jean-Paul Sartre (le Jean Sol Partre de L'Écume des Jours), Raymond Queneau, Simone de Beauvoir, Juliette Gréco, Marcel Mouloudji ou Miles Davis.
Son premier roman célèbre (sous le pseudonyme de Vernon Sullivan) est J'irai Cracher Sur Vos Tombes, écrit en 1946. Le roman est très controversé, notamment quand il est retrouvé sur les lieux d'un crime passionnel. Boris Vian est condamné en 1950 pour outrage aux bonnes mœurs. S'ensuivent des romans tout aussi noirs et sarcastiques : Les Morts Ont Tous la Même Peau, Et On Tuera Tous Les Affreux et Elles Se Rendent Pas Compte.
Si les œuvres signées Vernon Sullivan deviennent presque toujours des best sellers, les oeuvres signées Boris Vian sont jugées plus importantes par l'auteur mais sont moins reconnus par le grand public. Après l'échec commercial de L'Arrache-Cœur, il décide d'abandonner la littérature.
Passionné de jazz, il joue de la trompette de poche au Tabou, club de Saint-Germain-des-Prés. Il est aussi directeur artistique chez Philips et chroniqueur dans Jazz Hot de 1947 à 1958, où il tient une « revue de la presse » explosive et extravagante. C'est lui qui invente le terme `tube` afin de désigner un single.
Il a deux enfants, Patrick en 1942 et Carole en 1948 mais se sépare de sa femme en 1952. Il vit difficilement de traductions dans une chambre de bonne et le fisc s'acharne à lui soutirer des impôts anciens qu'il ne peut payer.
Son esprit fécond l’amène cependant à collaborer au Collège de Pataphysique (la science des solutions imaginaires), fondé en 1948. Dans cette aventure absurde, il y retrouve Raymond Queneau et est nommé "Équarrisseur" de première classe en 1952, puis "satrape" en mai 1953. Dans cette aimable corporation, il donne libre cours à son imagination pour fournir des communications et des inventions baroques telles que le "gidouillographe" ou le "pianocktail".
Le génial Stéphane Crête au Québec poursuit actuellement ce même type d'amusantes expériences avec ses laboratoires de théâtre tout à fait dans l'esprit de la pataphysique de Vian.
En 1954, il se remarie avec Ursula Kübler.
Il fait quelques apparitions sur scène, au théâtre et dans quelques films. Il joue par exemple le cardinal de Paris dans Notre-Dame de Paris de Jean Delannoy.
Quelques minutes après le début de l'adaptation en film, (qu'il désavoue)de J'Irai Cracher Sur Vos Tombes il s'effondre dans son siège et, avant d'arriver à l'hôpital, meurt d'une crise cardiaque.
Il aura écrit onze romans, quatre recueils de poèmes, plusieurs pièces de théâtre, des nouvelles, de nombreuses chroniques musicales (dans le magazine Jazz Hot), des scénarios de films, des centaines de chansons (notamment pour Serge Reggiani et Juliette Gréco), le tout avec une verve qui lui est propre et qui a inspiré le grand Serge Gainsbourg (Gainsbourg, dont on peut voir la vie adaptée en film au cinéma depuis peu.)
Puisque la vie lui semblait dangereusement évasive il utilisera d'inombrables pseudonymes afin de se rendre plus insaisisable encore.
Il sera Vernon Sullivan, Bison Ravi, Honoré Balzac, Baron Visi, Boriso Viana, Brisavion, Bison Duravi, Andy Blackshik, Agénor Bouillon, Xavier Clarke, S.Culape, Aimé D'Amour, Charles de Cassanove, Amélie de Lambineuse, Gédéon D'Éon, Michel DeLaroche, Joëlle du Beausset, Gérard Dunoyer, Jules Dupont, Fanaton, Hugo Hachebuission (par référence au Hugo HackenBush de Groucho Marx),Zéphirin Hanvélo, Onuphre Hirondelle, Odile Legrillon, Otto Link, Gédéon Mauve, Eugène Minoux, Gédéon Molle, Dr G. Molle, Professeur Gédéon Molle, Jacques K. Netty, Josèfe Pignerole, Adolphe Schmürz, Vernon Sinclair (pour ses collaborations avec Henri Salvador et Michel Legrand), Lydio Sincrazi, Anna Tof, Anna Tof de Raspail et Claude Varnier.
Il aura eu le temps d'être grand en seulement 39 ans.
Même si son succès est survenu surtout une fois mort.
Il aura été Boris Vian.
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