Coït 1:
Henri-George Clouzot a connu l'occupation. Il a même tourné un film, Le Corbeau, en pleine occupation Allemande. Entre 1942 et 1943. Le Corbeau. Bien que le film s'inspire d'un réel fait divers des années 20, Il s'agit d'une claire métaphore de la délation entre collabos et résistants pendant l'occupation. De plus, le film sera distribué par un distributeur allemand, ce qui fait croire aux gens que Clouzot est lui-même un collabo. Ce qui est tout à fait faux. Le scandale fait du film un énorme succès au box office. Un classique même tellement la qualité est bonne à tous les niveaux.
À la libération de la France, en 1945, Clouzot est quand même frappé d'une interdiction de travail à vie.
Mais grâce à l'activisme de supporteurs comme Jacques Becker, Pierre Bost mais surtout Henri Jeanson. Clouzot revient à la réalisation pour livrer le superbe film Quai des Orfèvres. Qui font oublier à tous, les soupçons pernicieux qu'on lui attribuait.
Clouzot tourne deux autres films, livrés, tous deux, en 1949, puis, en 1952, un autre énorme succès: Le Salaire de la Peur, avec Yves Montand et Charles Vanel. Il est alors surnommé le "Hitchcock français". Grand compliment.
Sombre et pessimiste, Clouzot est aussi victime de dépressions. En 1947, il est condamné pour homicide involontaire après avoir tué un homme de 71 ans, en conduisant trop vite en voiture.
Ses sujets de films ne reflètent pas la joie non plus. Les Diaboliques raconte l'histoire de deux femmes, découvrant qu'elles partagent le même homme, faisant un pacte pour le liquider. C'est même son épouse Véra, qui incarne l'une des deux diaboliques...
Il tourne un excellent documentaire sur Picasso en 1956, un dernier film avec Vera, puis l'histoire d'une femme (Brigitte Bardot) accusée du meurtre de son amant en 1960. Une histoire co-scénarisée avec Véra.
Cette année-là, Véra, le 15 décembre, décède d'une crise cardiaque à l'âge de 46 ans. Clouzot sombre dans une profonde dépression.
L'Enfer d'Henri-George Clouzot devait être son film suivant. Avec Serge Reggiani et Romy Schneider. Inspiré très tôt de l'expressionnisme, il compte révolutionner le cinéma avec ce film. Il écrit, isolé à Tahiti, l'histoire paranoïaque d'un homme se convaincant que sa femme le trompe avec des hommes comme avec des femmes. Oscillant perpétuellement entre le fantasme (en couleur) et le réel (en noir et blanc). Le film offre de splendides images expérimentales et est extraordinairement en avance sur son époque (1962-1964). Quand la Columbia voit les premières images, ils sont soufflés, ils lui accordent un budget illimité.
La corde du pendu. Clouzot est un perfectionniste légèrement obsessif. Ce tournage précipitera sa chute.
Il tourne des centaines de bobines en couleurs comme en noir et blanc. C'est en découvrant la forme du 8 1/2 de Federico Fellini que l'envie de Clouzot de briser des frontières artistiques lui prend. (Ironiquement, Fellini est mon prochain coït interrompu).
Mais l'enfer de Clouzot est réel. Pas complètement sorti de sa dépression, il fait souffrir ses acteurs en testant leurs limites physiques, morales et mentales et tente de trouver un équivalent plastique dans la musique électronique. Il deviendra prisonnier d'un perfectionnisme qui rend tout le monde à cran. Reggiani quitte le tournage pour l'hôpital. Jean-Louis Trintignant le remplace à la dernière minute mais cette fois, c'est Clouzot qui se tape un infarctus en cours de tournage.
Le film ne sera jamais terminé, monté, ni distribué.
Claude Chabrol, un autre Hitchcock aficionados, adapte le scénario en 1994 avec François Cluzet et Emmanuelle Béart dans les rôles principaux.
On retrouve les bandes originales du film de Clouzot au début des années 2000. Serge Bromberg et Ruxanda Medrea en font un documentaire formidable en 2009.
Mais qu'est-ce qu'on (amateurs de cinoche) aurait aimé avoir vu le produit fini...
Coït 2:
Federico Fellini : a Director's Notebook. C'est Federico qui signera le documentaire sur son propre projet avorté. Après 8 1/2, donc autour de 1964, il se lance dans le projet de tourner "Le Voyage de G.Mastoria", un projet qui devient vite un projet maudit. Fellini est un homme extrêmement superstitieux et complètement soumis aux voyants et autres types de charlatans du même genre. Le voyant qu'il consulte lui dit que si il complète ce film, Fellini n'en sortira pas vivant. Et ceci lui est dit APRÈS que Dino Di Laurentis, le producteur, ait consenti à débloquer des millions afin de faire construire des décors à la hauteur de son imaginaire. Des décors maintenant construits et qui ne serviront jamais.
Ça suffit pour FF. Il met le projet aux chiottes.
L'histoire racontait l'épopée du seul survivant d'un écrasement d'avion, un musicien, dans un décor entre monde réel et lendemain d'apocalypse. Fellini cesse son tournage, plonge dans le spiritisme pour son film suivant, et réutilisera certaines scènes tournées dans Satyricon, quelques années plus tard.
Coït 3:
My Best Friend's Birthday de Quentin Tarantino.
En 1984, Craig Hamann est un acteur en devenir. Il écrit un script d'une trentaine de pages. Tarantino, alors commis de club vidéo, s'attache au projet comme réalisateur, co-scénariste, (le film sous sa main, passe à 80 pages) et acteur dans le film. Hamann et Tarantino tournent le film sur une période de 4 ans en 16 mm. Pour 5000$. Des amis du club vidéos, des collègues de travail de Tarantino, donc Roger Avary (qui co-scénarisera Pulp Fiction et qui aura sa propre carrière de réalisateur), ainsi qu'Allen Garfield, qui donnait des cours de jeu d'acteur à Tarantino (et Hamann, bien entendu) joueront tous dans le film.
Un incendie dans le laboratoire de films qui traite la pellicule de Tarantino fait disparaître la fin du film et seulement 36 minutes en survivent.
Beaucoup d'éléments de ce film se retrouveront ailleurs. Tous les acteurs seront récupérés plus tard, soit dans Reservoir Dogs, Pulp Fiction et Kill Bill. Le nom d'Aldo Raine aussi. Et le fétichisme des pieds de Quentin est ici confessé pour vrai. Découverte dans tous ses films suivants.
(faux)Coït 4:
Lost in La Mancha de Keith Fulton et Louis Pepe.
Toute son histoire cauchemardesque se trouve ici.
Gilliam a toujours dit qu'un projet de film, si il n'a pas d'obstacles insurmontables à surmonter, ne l'intéresse pas. Il ne pouvait viser plus juste pour ce projet.
Le tournage, avec maintenant Jonathan Pryce, en Don Quichotte, et Adam Driver, en Toby (deux acteurs que j'adore!) s'est terminé le 4 juin dernier.
Ce coît n'en est pas un.
Un enfant approche au cinoche.
Du cinoche qui ne sera pas moche.
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