Aux nouvelles, on raconte l'histoire fameuse d'un homme/d'une femme qui marche 16, 17 ou 19 kilomètres par jour, sans se plaindre pour aller travailler. On présente l'histoire comme un exemple de bravoure et de résilience. Comme une belle histoire. On est ému avec innocence. On salue l'homme ou la femme.
Généralement, ça émeut quelqu'un à l'écoute qui tentera de réorganiser le désordre et qui lui offrira sa veille voiture ou du co-voiturage. Le gars sur la photo ici marchait 33 kilomètres par jour avant qu'un bon samaritain ne lui laisse sa vieille bagnole inutilisée.
Personne pour souligner toute les fois, que le travail marché, ne lui offrira jamais une telle chance. Personne pour souligner l'injustifiable débalancement de la situation.
On déguise l'horreur en moment magique.
C'est de la magie noire. C'est faire mourir l'Homme, petit à petit.
La banalisation de l'exploitation.
Comme la banalisation de la vérité avec Donald Trump.
Si celui-ci disait "La Corée du Nord nous tirera dessus demain avec leur arme nucléaire" le croiriez-vous?
Mais je m'égare. Les pelures de bananes sont partout. Les singes aussi.
Je veux encore vous parler de la seule certitude de la vie: La mort.
Dans une publicité sur le net aux États-Unis, à Chicago, pour la compagnie de partage routier, Lyft, une sorte de Uber local qui ne reconnait pas ses conducteurs comme des employés, mais comme des conducteurs volontaires, pour les soustraire aux dispositions des lois du travail, on a raconté, l'automne dernier l'histoire "touchante" de Mary.
Mary est conductrice et mentor de la compagnie Lyft. Après une journée de mentorat, 9 mois enceinte, elle choisit de prendre la route et de faire quelques voyages de gens souhaitant passer d'un endroit à un autre. Convaincue d'être loin de sa date d'accouchement prévue, elle prend un passager, puis un autre, puis un autre. Mais elle a commencé à avoir des contractions. Elle n'y a pas vraiment cru et est restée bravement chauffeuse en poste. Elle en a pris un dernier, Heureusement, dit la pub, les passagers n'avaient pas demandé de trop longs trajets et Mary a dû se rendre à l'hôpital après son dernier transport. Où, vous le devinez bien, on lui a confirmé que le travail avait commencé. Elle a accouché d'un merveilleux bébé, une petite fille, que l'on a vite habillée des couleurs de la compagnie Lyft pour une photo pour leur pub. (photo sur votre gauche)
"Avez-vous des histoires touchantes du genre à nous conter?" invite la pub en toute fin.
L'histoire de Mary est reçue de bien des manières. Pour certains, Mary est un exemple de dévouement et de courage, prendre des clients alors qu'on est en plein labeur maternel, et une manière formidable de faire un peu d'argent en tout temps et en toute circonstances!
Pour d'autres, c'est même excitant!
Mais c'est une histoire d'horreur. D'HORREUR.
La compagnie Lyft n'offre aucune assurance pour ses "conducteurs volontaires". Chaque voyage leur rapporte 11 dollars garantis. Pas plus. Mary a mis dans ses poches 44$ + son salaire de mentorat (probablement maigre)avant que sa fille ne naisse. Peut-être que Mary savait très bien qu'elle était en train d'accoucher, mais qu'elle avait davantage besoin du plus de 11$ possible. Mais peut-être aussi que Mary est une riche héritière qui ne fait ses voyages et court ses 11$ simplement par générosité et par pur altruisme, Pour se désennuyer.
Par dévouement.
Vraiment?...
Il faut être sérieusement déconnecté du monde réel et particulièrement tordu pour penser qu'une telle histoire ne mettra pas en lumière la précarité de la situation, le désespoir certain, et les conditions affreuses dans lesquelles certaines personnes sont forcées de se placer pour joindre les bouts, bien avant la beauté de la naissance de la petite fille commanditée. Que l'histoire soit vraie ou non. c'est à nouveau la banalisation d'une certaine noirceur. Est-ce bien ma planète?
Toujours aux États-Unis, une pub sur affiche cette fois. La compagnie Fiverr, une compagnie en ligne qui sollicite l'entrepreneurship pour parfois pas plus que 5$, a lancé sa campagne "in doers we trust".
Sur une affiche bien en vue à New York, dans les métros autant que sur les bus et taxis , le visage d'une femme aux yeux pochés, aux cheveux en bataille et les phrases: "Ton café est ton dîner, tu fais le suivi d'autres suivis, l'insomnie est ton médicament préféré? tu es probablement un entrepreneur", Dans une version web, on va plus loin, (cliquez sur Let us show you). On suggère même de tourner le dos à la mort.
NE SOYEZ PAS AVEUGLES, C'EST JUSTEMENT CE QU'ON VOUS VEND!!!!!!!!!!! Dans cette vie elle sera partout à vos trousses!
Ne plus manger?
Ne plus contrôler sa propre vie?
Ne plus dormir?
C'est ce qui m'a fait quitter l'entreprise de jambon qui pressait le citron entre 2004 et 2009 en exigeant plus de 60 heures de job (37,5 payées) par semaine et qui me donnait un laptop en toute fin, pour continuer à la maison (ce qui m'a plongé vers le gouffre mental).
MORT AU CANNIBALISME!
Suis-je le seul à y voir extraordinairement malsain?
Suis-je à ce point martien?
On ne dynamitera pas une compagnie aux idées comme celles de Fiverr. Bien au contraire.
On lui fera faire 110 millions sur les marchés!
Et vous ne comprenez pas les racines du terrorisme?
Je cherche un salaire secondaire en ce moment. Je survole assez rapidement le site InfopresseJobs qui m'offre tous les jours 11 ou 12 emplois disponibles. L'univers de la programmation informatique ou le marketing est absolument partout. 100% des jobs. Ces portes sont fermées/barrées pour moi. Clés perdues.
Maintenant je commence à me dire que je ne travaillerai plus jamais ailleurs que de mon sous-sol.
Pas assez zombie, ni cannibale.
Mort-vivant, tellement vivant.
Mais tellement tellement tellement vivant!
Mais le marché du travail ne recherche plus la vie,
il recherche la mort.
Je n'ai pas ça en moi avant longtemps.
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