dimanche 31 janvier 2016

Grand Roman Étatsunien

J'aurais voulu vous parler du roman dit "le grand roman américain" mais sa définition en est totalement erronée.

Le terme est né d'un essai de John William De Forest, un Étatsunien du 17ème siècle, qui parlait de cette littérature qui forge la nation des États-Unis.

Mais les États-Unis ne sont PAS l'Amérique.

L'Amérique devrait aussi comprendre le Canada, le Mexique, et toute l'Amérique du Sud.

La liste des 27 romans étatsuniens, breveté comme "grand roman américain" ne comprend donc pas The Game de Ken Dryden, No Logo de Noami Klein, Margaret Atwood, Douglas Coupland, Gabriel Garcia Marquez, Roberto Bolano, Mario Vargas Llosa, Jorge Luis Borges ou Paulo Coehlo.

Voici ce que cette prestigieuse liste contient. Et fait des États-Unis, un pays, parfois, très bien.

1851: Moby Dick. Herman Melville.
Melville était marin. Il était donc normal qu'il en parle avec vérité dans ses oeuvres. Inspiré du plus célèbre roman au monde, la Bible, pour créer ses personnages, la chasse à la baleine est à cette époque à son âge d'or. Presqu'ignoré par la critique à sa sortie, le livre est considéré comme un monument, beaucoup plus tard quand on fête les 100 ans de naissance de Melville. En 1952, le bateau français l'Anglo-Norse capture une baleine blanche de 55 tonnes dont la mâchoire était recourbée en faucille. La baleine de Melville n'était peut-être pas que symbole...

1884: The Adventures of Huckleberry Finn. Mark Twain.
Considéré comme le tout premier roman Étatsunien entre autre parce qu'écrit au "je" (contrairement au livre auquel il fait suite: Les Aventures de Tom Sawyer) mais aussi par le langue choisie pour les personnages est celle de la rue. Avec du "slang", on entend pour la première fois le peuple des États-Unis à la lecture de ses aventures du Mississippi.

1925: The Great Gatsby. F.Scott Fitzgerald.
Inspiré en partie par la triste vie de George Remus, et adapté au moins deux fois au cinéma, le chef d'oeuvre de Fitzgerald traite de décadence, d'idéalisme, de résistance au changement, d'ambition sociale, d'excès; il trace le portrait de l'ère du jazz et des années folles (les années 20) et a servi d'avertissement envers les étrangers qui rêvaient du rêve américain.*

1932: Light In August, William Faulkner.
Gothique du Sud et moderniste, Faulkner s'inspire de la tradition orale avec une structure narrative aussi inspirée des allégories chrétiennes. Les thèmes de la race, du sexe, des classes sociales, de la religion et du Sud des États-Unis sont déjà en place dans cette histoire de prohibition et de ségrégation raciale.

1936: Absalom, Absalom. William Faulkner.
Auteur chouchou des États-Unis, il est l'un des deux qui aura 2 titres dans cette liste. Cette fois, son livre traite de la guerre civile et de l'impact de cette guerre sur trois familles du Sud des États-Unis.

1936: Gone With The Wind. Margaret Mitchell.
Les tribulations d'une enfant gâtée, fille de propriétaire de plantation et la survie de tous aux prises avec des problèmes économiques et la guerre civile aux États-Unis. Le film a eu autant de succès que le livre, sinon plus. Margaret est l'une des 4 femmes, parmi les 25 auteurs célébrés comme auteurs fondateurs d'une nation.

1938: U.S.A. Trilogy. John Dos Passos.
The 42nd Parrallel, 1919 & The Big Money sont réunis en 1938 comme un seul grand livre racontant, en croisant fiction, histoire, écriture automatique, fragments de titre et d'articles de journaux, paroles de chansons populaires et biographie, les États-Unis, tel que cet ancien étudiant d'Harvard, aussi considéré comme un membre de la génération perdue, les percevait.*

1939: The Grapes of Wrath de John Steinbeck.*

1951: The Catcher in the Rye de J.D.Salinger.  **

1952: Invisible Man de Ralph Ellison.
Unique roman publié du vivant de ce professeur noir et critique littéraire, son livre soutient la comparaison avec l'existentialisme de Sartre ou Camus et décrit aussi l'élaboration d'une identité personnelle au sein de la lutte de tout un peuple qui cherche à se définir par lui-même. Ellison, qui se dit invisible, mêle divers idiomes et registres dans cette enquête passionnée au coeur de la politique de l'être.

1953: The Adventures of Augie March. Saul Bellow.
Cet auteur né et qui a passé les 9 premières années de sa vie à Lachine, tout à fait chez nous, avant d'émigrer à Chicago nous offre un picaresque roman, un roman d'apprentissage aussi où Augie March, ayant grandi dans la grande dépression aux États-Unis, passe de jeune homme à adulte.

1955: Lolita. Vladimir Nabokov.
Humbert Humbert a 37 ou 38 ans et est obsédé par Dolores, qu'il appelle aussi Lolita, mais qui n'a que 12 ans. Humbert est enseignant. So was Vladimir...Controversé traité du désir, le livre sera adapté deux fois au cinéma, dont une fois par Kubrick, sera le sujet de plusieurs pièces de théâtre, de deux opéras et d'une comédie musicale de Broadway. Lolita, light of my life, fire of my loins. My sin, my soul. Lo-lee-ta: the tip of the tongue taking a trip of three steps down the palate to tap, at three, on the teeth. Lo.Lee.Ta. She was Lo , plain Lo, in the morning, standing four feet ten in one sock. She was Lola in slacks. Shw was Dolly at school, She was Dolores on the dotted line. But in my arms she was always Lolita. Creepy. 

1960: To Kill a Mockingbird. Harper Lee.
Inspiré librement de sa propre famille et de ses voisins, cette histoire d'inégalité raciale et de viol est écrit avec beaucoup de candeur, de chaleur et même d'humour. Atticus Finch, inspiré par son propre père. est devenu un modèle moral pour un grand nombre d'Étatsunien. Gregory Peck voulait même jouer le personnage tout à fait bénévolement tellement il en aimait les traits de caractères. L'oiseau-moqueur du titre, c'est l'innocence. Ce sera le seul roman de la récluse romancière. Un trésor national.

1960, 1971, 1981, 1990, 2000:
Rabbit Run*, Rabbit Reddux, Rabbit is Rich, Rabbit at Rest & Rabbit Remembered.
John Updike.
Le premier roman parle de trois mois dans la vie de l'ancienne vedette de basket du collège, John Rabbit, maintenant mal marié et qui a 26 ans. Il tente de se déprendre des contraintes que la vie lui impose. Dans le second volet, Culpabilité, sexe, mort et racisme sont traités alors que Rabbit est plaqué par sa femme qui le quitte pour un autre homme, le laissant avec son fils de 13 ans. Réuni avec sa femme dans le troisième volet, Rabbit n'est pas plus satisfait, ni de son mariage, ni de son fils, ni de sa vie en général. Dans le quatrième volet, Rabbit est gros et n'est plus l'ombre de la star de basket qu'il était il y a 40 ans. Le livre se termine sur sa mort. Le cinquième volet nous rappelle John.

1973: Gravity's Rainbow. Thomas Pynchon.
Pynchon plante la majeure partie de son complexe roman en Europe pendant la Second Grand Guerre. Mathématicien de l'écriture, il fait passer son roman de la petite à la grande culture, du dialogue littéraire aux échanges vulgaires, des propos scientifiques aux spéculations métaphysiques. Pynchon inclus habilement de nombreuses réelles situation de la Seconde Grande Guerre qui comblera le féru d'histoire. Fameux.*

1975: J R .William Gaddys.
Digne héritier de Jonathan Swift, Gaddys nous offre une satire du rêve américain à "l'envers" avec son histoire de jeune garçon de 11 ans, bâtissant sa fortune sous des identités fausses au téléphone se magasinant des actions sur les marchés financiers.

1985: Blood Meridian or The Evening Redness in the West. Cormac McCarthy.
Chronique suivant le Kid et la Glanton gang au far-Ouest entre 1849 et 1850. qui chassent les scalps des indiens et des mexicains de la frontière pour de l'argent, par simple plaisir et finalement par compulsion.

1985: Lonesome Dove. Larry McMurtry.
La première partie était d'abord écrite pour être un film pour Peter Bogdanovich mettant en vedette John Wayne, James Stewart et Henry Fonda. Toutefois, Wayne a refusé le rôle (sous les conseils de John Ford) et James Stewart a refusé de s'impliquer sans Wayne. Le texte est donc devenu un roman. Il raconte  (sous le couvert de la fiction) les voyages de bétail Charles Goodnight et Oliver Loving, attaqués par les Comanches et les Cheyennes au 19ème siècle au Texas.

1987: Beloved. Toni Morrison.
Inspirée de l'histoire de Margaret Garner, esclave afro-américaine, qui avait fui l'esclavasgisme du Kentucky pour se réfugier en Ohio, État Libre pour les gens de la communauté noire. Morrison plante son histoire à Cincinnatti où un eslcavagiste retrouve une ancienne esclave et la reprend à son service. Afin d'épargner sa fille de 2 ans de cette vie sale, sa mère la tue, mais l'enfant revient la hanter des années plus tard.

1996: Infinite Jest. David Foster Wallace.
Principalement concentré sur une académie de tennis junior et un centre de réadaptation pour gens ayant souffert de dépendance aux drogues. Le roman aux 1001 notes de bas de page, parle de dépendance de toute sorte, de remise en forme, de suicide, de relations familiales, de domaine artistique, théorise sur quelques films, des relations États-Unis/Canada, de la séparation du Québec (!) de tennis, C'est un roman encyclopédique. J'ai ce roman chez moi mais suis effrayé de le commencer puisque Wallace a choisi de se pendre en septembre 2008. Un grand talent s'effaçait au profit de la maladie mentale à 46 ans.

1997: Mason & Dixon. Thomas Pynchon.
L'histoire à moitié fictive des exploits des astronomes et géomètres britanniques Charles Mason & Jeremiah Dixon qui établiront la ligne de démarcation entre les États-Unis abolitionnistes du Nord et les États-Unis esclavagistes du Sud au seuil de la Guerre d'indépendance.

1997: American Pastoral. Philip Roth.
La vie d'un couple de sublimés, lui quart-arrière étoile de son école secondaire et elle, reine de beauté de cette même école, et leur vie d'adultes mariés et de parents imparfaits, telle que racontée par leurs amis. Un chef d'oeuvre.*

1997: Underworld. Don Delillo.
Ils se sont passés le mot en 1997!, Dellilo nous fait passer des années 50 aux années 90 au travers des yeux de Nick Shay, adolescent délinquant, et nous fait vivre en temps réels de grands évènements survenus en Amérique, la crise de missile cubaine, les séries mondiales de 1951, etc. J.Edgar Hoover et Lenny Bruce y ont des rôles dans ce récit non linéaire et où la gestion des déchets est une métaphore. Brillant.*

2000: The Amazing Adventures of Kavalier & Clay. Micheal Chabon.
Cette histoire de deux cousins juifs, le dessinateur Joe Kavalier et le scénariste Sam Clay, qui feront leur ascension dans l'univers de la BD, d'avant la guerre à après la guerre jusqu'à l'âge d'or des magazines de BD et de superhéros est inspirée des vies de Jack Kirby, Bob Kane, Stan Lee, Jerry Siegel, Joe Shuster, Joe Simon, Will Eisner et Jim Steranko. De plus, Chabon, en parlant d'un personnage hétérosexuel et d'un autre gay, a pu dévoiler deux facettes de sa propre personnalité. Le livre raconte l'âge d'or des comics d'Amérique.*

2004: Gilead. Marilynne Robinson.
Roman épistolaire, un vieux pasteur de l'Iowa, se savant en train de mourir, choisit de raconter sa vie à son petit-fils de 7 ans qui n'aura autrement que très peu de souvenirs de lui. Ce faisant, il survole l'ère des ségrégations raciales, la guerre civile des États-Unis et les différentes modulations de pouvoir de la religion au pays au travers des temps.

2009: American Rust. Philip Meyer.
Le livre, un an dans la crise économique mondiale, situe son action dans la ville fictive de Buell dans le comté de Fayette en Pennsylvanie. Région rurale appelée "la vallée" par les villes voisine qui vivent de l'industrie de l'acier, la ville verra sa classe moyenne, peu à peu s'anéantir alors que les manufactures ferment les unes après les autres. Le malaise social et économique reflète l'ère du capitalisme triomphant en plein déclin.

2010: Freedom. Jonathan Franzen.
L'histoire suit les Berglund sur plusieurs années, leurs amis et leurs amours, des dernières décennies du 20ème siècle à 2008. Cette famille néo-libérale du Minnesota touchera aux problèmes environnementaux de notre époque, au monde de la musique, à la fidélité amoureuse et son contraire et à l'engagement en Irak.

Depuis 5 ans, rien.

Mais si vous voulez comprendre une partie de l'Amérique, plongez vous dans l'un de ses livres en 2016.

*Lu
** Lu et relu.






samedi 30 janvier 2016

Occultisme Chez David Bowie

"Here I am, not quite dead..."
-DJ

Je sais, trois fois Bowie en autant de semaines, mais il était important pour moi et je vous promets de ne plus trop vous empester avec son univers.

...du moins pas consciemment...

À son très chic départ, j'ai eu le réflexe de revisiter ses oeuvres. Incluant, les derniers vidéoclips de l'agnostique David qui aura atteint un niveau d'illumination presque divin avec une habileté rare. Il semble même qu'il y ait eu plusieurs secrets au travers de son oeuvre qui ai mené à des messages cryptés de sa part pour une partie de l'humanité prête à écouter.

Alors qu'il est excessivement facile de mettre ses excentricités au travers des décennies sur le compte de l'alcool et des drogues (ce qui est aussi vrai) la vraie obsession de Bowie aura  peut-être toujours été l'occultisme.

Dès ses 16 ans, David Jones se trouvait très intéressé par l'occultisme moderne. Toute sa carrière, il transformera son corps en différent "vaisseaux" de transmission, en différents personnages qui parleront au travers de lui. Toujours avec une certaine profondeur occulte.

Son dernier album ne fait très certainement pas exception. Tout y est même méticuleusement calculé dans le dernier chapitre du livre de Bowie.

Mais revenons à la genèse de Bowie.

1971:

I'm closer to the Golden Dawn
Immersed in Crowley's uniform of imagery
(...)
I'm not a prophet or a stoneage man 
Just a mortal potential of a superman... 

C'est tiré de Quicksand dont le reste des paroles est encore plus clair. The Golden Dawn, était une société secrète fondée à Londres en 1888. L'aube dorée se consacrait à l'étude de sciences occultes et à leur enseignement. On y parlait de voyages astraux, de magie, de yoga (tous présents dans la vie de Bowie) et on logeait cela sous le terme Cabbala, devenu avec le temps Kabbalah. On essayait aussi de communiquer avec les démons et les anges.

"L'uniforme de Crowley " est une référence à Aleister Crowley, ex-membre du Golden Dawn et occultiste célèbre fondateur de l'Ordo Templi Orientis.  Crowley était connu principalement pour ses essais sur la magie sexuelle, la magie noire et sa philosophie: le thelema.
Dès 1971, quand on se prépare à relancer sur le marché Space Oddity, une photo de la jaquette intérieure nous montre Bowie "déguisé en Crowley". (ici à droite).

"Mes intérêts sont dans le Kabbalah et le Crowleisme. Cette zone noire et inquiétante , ce monde placé du mauvais côté du cerveau" dira-t-il 5 ans plus tard.

À l'aube des années, 80, récemment éprouvré par un divorce et une poursuite contre son agent. il reprend son Major pour le placer dans les limbes, strung out in heaven's high, hitting an high time low.

En 1983, il ajoute:
"J'ai plus qu'un intérêt mineur pour l'égyptologie, le mysticisme et le Kabbalah. Il m'a semblé évident un moment et je fus tout ce qu'il y a de plus transparent à ce sujet, que la réponse à la vie se trouvait là-dedans. Ma vie entière serait transformée dans cette fantaisie nihiliste étrange d'un monde condamné et condamnable, dans ce monde de personnages mythiques et d'imminent totalitarisme. Je vous parle d'argent bien entendu"

En 1969, quelques semaines bien calculées avant les images de l'homme sur la lune, Bowie nous introduit au personnage de Major Tom avec une chanson qui deviendra la trame sonore non officielle du prétendu voyage d'Armstrong et compagnie.

Here I am, floating 'round my tin can,
far aboive the moon
Planet earth is blue 
and there's nothing I can do

À un niveau simplement ésotérique, l'ascension de Major Tom représente le mortel tentant d'atteindre le divinatoire. Une interprétation confirmée 47 ans plus tard dans son clip Blackstar. On y reviendra.

En 1972, Bowie propose toutefois le contraire: un martien qui descend sur terre. Un être androgyne arrivé de l'infini pour annoncer la fin du monde dans 5 ans. Le personnage de Ziggy est le messager tenu par ses disciples jusqu'à ce qu'il soit sacrifié par son art dans son suicide rock'n roll.

Une histoire populaire depuis toujours, celle de Jésus. Le messie sacrifié.

En occultisme, le plus haut niveau d'illumination est celui obtenu au travers de l'internalisation des dualités et l'équilibre entre les forces opposées. Le bon et le mauvais, l'actif et le passif, le mâle et la femelle. Ceci est généralement symbolisé par un hermaphrodite cornu androgyne.

5 ans après avoir chanté la fin du monde, Ziggy n'est plus et le personnage du totalitaire berlinois naît. En 1976, Bowie prétend ne plus se rappeler de l'enregistrement de l'album Station to Station. Il dit aussi que cet album fût concocté par "une toute autre personne que lui-même". Une personne trahie par la cocaïne, oui,  mais aussi envoûtée par la mysticisme du Kabbalah et de son arbre de vie.

Here we are
one magical movement
from Keter to Malkhut 

Kether & Mether sont deux des 10 éléments de l'arbre de vie du Kabbalah. L'élément le plus élevé et le plus bas, respectivement. Bowie s'étonnera d'ailleurs que personne n'ait relevé les allusions claires aux stations auxquelles il faisait référence. Il considère cette époque comme une traîtrise des secrets du Kabbalah, et parle d'une période misérable de sa vie. Période qui coïncide avec ses fréquentations de Jimmy Page, lui versé dans la sorcellerie, qui faisait de Bowie, sa victime préférée.

Ça aide à oublier l'enregistrement d'un album
et à s'exiler là où a eu lieu le pire totalitarisme qui soit...

L'intérieur de la pochette de Station to Station nous dévoile Bowie en train de dessiner au sol l'arbre de vie du Kabbalah.

Dans les clips de Blackstar & Lazarus Bowie retourne à tout ça pour les plus occultes de ses fans.

La mythologie des cinq dernières décennies de Bowie boucle la boucle majestueusement.

Au centre des clips, un humain tentant de joindre le divinatoire.

Major Tom est mort en ouverture de Blackstar. Son crâne est décoré de bijoux, il est sanctifié. Une femme tient ce crâne autour de deux rangées de femmes qui tremblent en sa présence. Un  Dieu est né. Dans le clip. on évoque aussi la magie sexuelle,
Le crâne est déposé sur le dos arqué d'une femme en position de réception sexuelle anale. Puis, trois épouvantails jouent du bassin de manière suggestive. En mode crucifixion.

Parfum d'Aleister Crowley.

Le réalisateur du clip, Johan Reck ne le cache en rien, il est un très grand fan de Crowley.

"L'étoile noire" fait référence au soleil noir.

Bowie incarne trois personnages dans son clip de Blackstar.
-L'aveugle aux yeux bandés, l'ignorant, le suiveur,

-Le prophète tendant son livre des "vérités" auprès de fidèles.

-Le flamboyant fou, semblant être le dernier personnage incarnable par ce mourant avec son visage aux expressions excentriques.

Trois couches de subtilité. Les naïfs.  les prétendus en contact direct avec la "main de Dieu" dans une version bâtarde de messager grotesque et la personnalité charismatique qui vend les idées.

Bowie nous dit qu'il est à la fois l'aveugle et un initié de l'occulte. Une étoile noire.

Son tout dernier clip nous parle de sa mort. Et suggère une résurrection dans le titre. Au lit, Bowie, mourant. Les 4 premières lignes sont claires. Puis, un Bowie plus en forme. se permettant même quelques gestes de danse.

Dans quel costume?
Regardez plus haut.
Oui, le même qu'en 1976 sur la pochette de Station to Station.
Quand il dessinait l'arbre de vie du Kabbalah.

Comme animé par une force surnaturelle, Bowie écrit comme si l'occulte était sa principale source d'inspiration. On y voit même le crâne de Major Tom décoré, comme si Bowie était maintenant possesseur de la connaissance occulte ultime, puisque mort.
Bowie expose enfin que son corps a bien quitté la terre, mais qu'un autre "lui" lui survivra par sa musique.

Qu'il s'est rendu immortel.

Everyone knows me now

Planifiant méticuleusement sa mort et la transformant en oeuvre d'art, il nous montrait comment un artiste peut sortir de cette planète avec dignité et cohérence.

Il nous rappelle aussi que les idoles sont des Dieux.

Bowie était-il vraiment influencé par les zones d'ombres des forces occultes ou simplement un brillant homme d'affaires en mesure de comprendre les histoires qui vendent le mieux dans le monde entier?

La réponse se trouve dans les 4 lignes de Quicksand.

I'm closer to the Golden Dawn
Immersed in Crowley's uniform of imagery
(...)
I'm not a prophet or a stoneage man 
Just a mortal potential of a superman... 

Au final, c'est aussi pour échapper à la folie dont a été victime sa première idole, son frère Terry, que Bowie s'est investi dans des univers parallèles et au travers de multiples doubles.

Rien de tellement sorcier.


"The Stars are never sleeping, the dead ones and the living..."