Le titre de la chronique est inspiré de 4 albums que je connais pas coeur. Qui sont à la fois ma chair et mon sang.
Par ordre de création:
Blonde on Blonde de Bob Dylan
The Idiot d'Iggy Pop
Low de David Bowie
The Unforgettable Fire de U2
Bibi c'est aussi moi. Tout comme c'est la terminaison du terme habibi, qui, en dialecte irakien veut dire "je t'aime".
Musique, je t'aime.
1970.
Jean-Pierre Ferland a 10 albums derrière la casquette. Il chante depuis 1959 et obtient du succès autant ici qu'en Europe. Il chante plutôt lyriquement et garde un côté charmeur et amoureux des femmes, évident.
Quand Ferland, qui a tour à tour été animateur de Jeunesse Oblige à Radio-Canada, récipiendaire du grand prix du festival du disque de Montréal, participant du premier gala de la Place-des-Arts et en tournée en Ontario, L'île-du-Prince-Edouard, le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse, revient de France, où il a fait sensation, il gagne le grand prix du disque de l'Académie Charles-Cros. Il se produit à la Comédie Canadienne et à Terre des Hommes. Il sera sur scène avec Marie Laforêt à l'Olympia et à La Tête de l'Art avant de chanter à l'Exposition Internationale d'Osaka.
Les années 60 ont bouleversé les moeurs à travers le monde. 6 de ses 10 premiers albums se sont appelés Jean-Pierre ou Jean-Pierre Ferland. Il chante à la Moustaki ou Brassens, mais sent qu'il a besoin de donner un sérieux coup de volant. Les Beatles et l'invasion britannique sont venus révolutionner le monde de la musique. Ferland se sent un peut trop "square" dans une société de plus en plus "hip". Il a le coeur cool. Et veut le crier.
En studio, il engage trois musiciens des États-Unis. David Spinozza à la guitare, Tony Levin à la basse et Jim Young à la batterie. Le premier sera musicien pour Paul McCartney sur son album Ram. Il sera aussi musicien pour Paul Simon. Le second sera du band de Peter Gabriel, de King Crimson, Asia, Yes, Pink Floyd, Sarah McLachlan, Stevie Nicks, David Bowie*. Le dernier sera batteur pour Frank Sinatra et Ben E. King. Michel Robidoux s'occupera du piano et des claviers qui feront entendre pour la première fois sur un album Québécois, un synthétiseur Moog.
À l'image du Abbey Road des Beatles, paru en 1969, JPF enregistrera un album concept qui ne laisse aucun espace entre les chansons. Les pièces s'enchaînent naturellement comme un long son continu avec variations harmonisées.
L'album, résolument moderne pour le Québec de 1970, a à la production André Perry qui fera un travail hors pair. Il est enregistré dans une ancienne église de Montréal et se vendra à 60 000 exmeplaires dès sa première année. C'est aussi Perry qui enregistrera le Give Peace a Chance de John & Yoko à l'hôtel du Queen Elizabeth.
Jean-Pierre Ferland est né le jour de la fête des Québécois. Dans une semaine, il aura 84 ans.
Il y a 48 ans, il lançait dans la sphère musicale, une galette magique. Qui a drôlement bien vieillie.
JAUNE de JEAN-PIERRE FERLAND
Le disque s'ouvre sur une minute de musique guidée par une guitare et la voix de JPF qui nous invite ailleurs. Et nous dit qu'il faudrait y aller. Invitation à un nouveau son.
La première chanson complète offerte sera vite un classique. Ferland semble y faire son deuil d'un ancien "moi". On raconte que seraient passés en studio Mick Jagger, Cat Stevens et Art Gartfunkel (séparément) lors de l'enregistrement de ce disque.
La pièce qui suit est aussi une chanson qui a traversé les époques et que Ferland n'hésites pas à rechanter en spectacle pour le plus grand plaisir de ses fans qui entonnes tous le refrain. Guido Basso fait l'arrangement des cuivres.
La chanson d'après, est un clin d'oeil à la prison de Sing Sing, duquel le protagoniste chantant serait libéré, après une incarcération de 20 ans. Ferland ramène le refrain de Quand on aime, on a toujours 20 ans, en plein milieu de cette chanson. Les superbes arrangements de cordes sont travaillées par Josiane Roy.
La chanson suivante commence par un roulement de batterie de Jim Young et le leitmotiv musical rappelle un immense hit du printemps 1969. Jean-Pierre se trompe, Dieu n'est pas un américain. Je le sais, je l'ai vue. C'est une belle femme noire. Les Petits Chanteurs du Mont-Royal apparaissent ici pour la première fois de l'album. La construction offre un peu de cabaret, ce qui est fort habile. Dieu est comme aujourd'hui. Fâché. Et comme toujours, à la fin, il s'étouffe dans sa rage.
On entend des papotements au début du morceau suivant. Un fameux morceau chanté avec un accompagnement orchetral qui est l'oeuvre de Buddy Fasano et Ant Phillips. Les Petits Chanteurs du Mont-Royal y sont encore plus présents. Il y a un peu du Gainsbourg de Melody Nelson là-dessus. Sa fille a d'ailleurs repris le morceau en 2009. Il y a quelque chose de joliment sinistre là-dessus. On termine aussi sur des échos de papotements de café.
La pièce qui suit n'est qu'un pont musical d'un cinquantaine de secondes. Elle enchaîne directement avec Y a des Jours. Ces deux chansons n'ont pas de liens cybernétiques. Elle sont plus acoustiques et rappellent le Ferland entre 1959 et 1969. Chansonnier.
Au secours! sont les derniers mots de la chanson précédente. Je le dis moi-même en ce moment car aucun lien du net n'est aussi disponible pour ce morceau. Une autre ballade plus folk que psychédélique qui confesse que JPF ne saurait pas quoi dire à une femme quand il la tient dans ses bras. Me semble, oui. Le dernier 45 secondes est plus électrisé et l'orchestre y est aussi très présent.
L'épilogue en est un faux. Non seulement ne termine-t-il pas l'album, mais il reprend aussi une partie du Petit Roi. Ça ne dure que 1 minute 22 mais offre un rappel aérien de ce qu'on vient d'entendre.
Le dernier morceau est assez inexplicable. Il est en anglais. Le synthé est assez agressant. Les choeurs sont aussi à faire hérisser quelques poils de bras. Pour terminer, l'accent de Ferland est assez pénible. Stick to french, JP!
Un album assez formidable pour nostalgiques, amateurs d'orchestrations, anciens hippies, Baby-boomers, Fiers Québécois, amateurs d'albums concepts, amateurs de jolis arrangements chansonniers.
*Sur Heaten et sur The Next Day
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