lundi 2 juin 2014

Elle a Dit Oui

Elle a été élevée par un papa musulman et par une mère chrétienne orthodoxe.

Elle a grandi et réside toujours au Soudan, pays qui depuis 1983, interdit les conversions de religion sous peine de mort.

Elle a été élevée selon les traditions chrétiennes orthodoxes puisque de toute façon, enfant, son père a été principalement absent de la maison. Elle le connait si peu (et vice-versa) que la foi musulmane (et ses dogmes et rituels) lui sont parfaitement étrangers.

Meriam Yahia Ibrahim Ishag est tombée en amour. Avec Daniel Wahi, un soudanais chrétien. Ils se sont mariés en 2011. Ont eu un garçon. Mais voilà, l'information a circulé (et Dieu sait que sous les clochers, ils circulent les informations) que Madame Ibrahim Ishag serait plutôt une musulmane défroquée. La rumeur, grosse comme une tumeur a court-circuité les esprits du village. Le Soudan, à ce niveau, est un village. Mariée à un chrétien, elle a été condamnée à 100 coups de fouets pour "adultère".

En disant oui à son mari à l'autel, et au lit.

Selon l'interprétation soudanaise de la charia (la loi islamique), une musulmane ne peut pas épouser un non-musulman, et toute union de ce type est considérée comme un "adultère".  Miss Ibrahim Ishag nie avec véhémence avoir un jour été musulmane puisqu'elle se sait chrétienne orthodoxe depuis toujours. Mais cette interprétation, qui ne peut pas être plus vieille que 27 ans, l'âge de la victime, ne vaut pas l'ancestrale et décrépite interprétation de la charia. Enceinte de 8 mois lorsque envoyée en prison à la mi-mai, puisque aussi condamnée à mort pour apostasie (reniement public de sa foi), elle a accouché d'une petite fillette mardi dernier.

Les chaines aux pieds. Son mari a eu besoin de son avocat pour pouvoir la voir le lendemain, sans ses chaînes, et avec la nouvelle-née.

Un tollé international s'est levé, avec le Premier Ministre Anglais David Cameron en tête, pour s'insurger contre cette méthode barbare de traiter de la condition humaine sur son propre peuple. Pour faire bonne impression, un diplomate soudanais a dit que la dame serait libérée sous peu. Nous sommes 18 jours suivant son emprisonnement, et personne n'a approché, ou bien son mari, ou elle-même pour la libérer.

Au Soudan, la tension est très forte entre les musulmans arabes (dits durs et sévères) et les musulmans noirs (dits mou et plus ou moins appliqués dans leur foi). Les premiers n'hésitent pas à considérer les seconds comme des inférieurs. Alors quand en plus, ces "inférieurs noirs" doivent être chrétien!  Ai-je besoin de vous dire de quel clan étaient ceux qui l'ont condamnée?...
En Inde, là où on découvre petit à petit un traitement de la femme extraordinairement hostile, les femmes coupables d'apostasie se font tondre les cheveux. C'est moins radical que la peine de mort, mais c'est d'un intégrisme fort étouffant quand même.

Les intégristes pourrissent tout ce à quoi il s'attache. Et les intégristes soudanais se sont attachés à la citoyenne Meriam Yahia Ibrahim Ishag. Une molle musulmane noire à leur yeux, yeux qui n'ont pas d'oreilles pour entendre cette femme expliquer sa propre version des choses. Femme prisonnière en raison d'une certaine forme de liberté quand même, dans un pays qui n'en accord pas beaucoup quand vient le temps de jaser religion.

Femme, et famille, qui, peu importe ce qui se produit, ne sera jamais en sécurité dans ce pays qui était le leur. Celui de leur amour. Celui où Meriam a dit oui à cet amour.

Village.

J'espère que présentement, en prison, elle pense "non" quand elle pense à son pays. Son village mental.
J'espère que Daniel à non seulement espoir de la retrouver en toute liberté, mais a aussi un plan d'exil. Ils seront persona non grata au Soudan.

Il n'y a pas si longtemps, (oui il y a longtemps quand même) il y a eu les croisades qui ont été sanguinaires et au nom de la religion chrétienne. La guerre binaire de W. Bush "Either with us, or against us" en était une sur la foi.

La seule foi en laquelle Meriam Yahia Ibrahim Ishag veut croire est celle de l'amour inconditionnel envers son mari (et vice-versa) ainsi que celui qu'elle compte donner à ses deux marmots.

Si elle peut les élever ailleurs que dans le chaos.

Meriam Yahia Ibrahim Ishag a dit oui à l'amour.
Ça pourrait lui coûter la vie.

Ils doivent échapper au Soudan.
Où ils ne seront JAMAIS en sécurité.
Tant que par la charia, ce pays sera gangrené.

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