mercredi 21 février 2024

Relectures

Je n'ai jamais vraiment écouté la série télé Friends. Entre 1994 et 2004, j'avais de 22 à 32 ans. 

La vie de colocation s'éloignait de moi. Après 2 ans d'amour à distance avec l'amoureuse, elle choisissait de passer du 418 au 514 pour venir me rejoindre, en 1994, et, ensemble, nous avons bâti notre amour et tricoté deux chef d'oeuvres d'enfants dont nous sommes très fiers. Je graduais de l'Université, la belle également, nous étions très occupés à se bâtir amoureusement ensemble, mais professionnellement aussi. Là où personne ne nous attendais. En 1995, elle et moi habitions ensemble jusqu'à nos jours. 

La série Friends n'avait pas capté mon intérêt (ça jouait à quelle heure ? quand ?). Nos rendez-vous étaient ailleurs dans la vie, sinon pour une fin du monde à 7 heures. On était trop occupés à vivre loin des écrans. En 2004, on avait une maison, 2 chats, 2 enfants. Dont une tout à fait naissante. 

J'ai essayé de suivre la série une fois celle-ci terminée. Comme j'aime faire les choses dans l'ordre, je voulais partir de la première et me rendre à la 10ème. Mais j'ai pas duré. Pas même la première saison. Plusieurs fois je me suis entendu penser "à quelle heure le punch ?". Le rythme des comédies a beaucoup changé avec le temps, et au début, et c'est normal, le rythme des dialogues prenait du temps à faire mouche. Après 6 épisodes de la première saison, j'ai abandonné. Je ne m'y reconnaissais pas chez les 3 gars et il y avait entre autre une haine croissante de ma part du personnage de Ross. Que je trouvais si plaignard et insupportable. Je croyais aussi comprendre qu'il devait nous être sympathique. 

J'ai été content de voir, avec le temps, que les relectures de la série dépeignent ce personnage comme racine de masculinité toxique. Ross est jaloux, jalousie, source de millions de maux. Possessif. Il met un terme à sa relation avec Bonnie sous le seul reproche qu'elle se soit rasé la tête complètement. Donc très superficiel aussi. Il a des sentiments amoureux envers une cousine et s'impose physiquement dans cette direction sur elle avant qu'elle ne le repousse. Quand Rachel quitte le café pour réaliser son rêve de travailler dans le milieu de la mode, Ross, alors son conjoint amoureux, n'en supporte aucunement l'idée et est le pire ami à avoir, la décourageant de toutes les manières et ne commandant l'attention que sur lui. Dans la saison III, il humilie Rachel sur ses lieux de travail, voulant marquer son territoire. Extraordinairement malsain. Quand Phoebe pense que sa mère décédée a été réincarnée en chat, Ross lui criera que ce n'est pas le cas. Quand le fils de Ross joue avec une Barbie, il s'inquiète et lui place un G.I. Joe dans les mains. Passe l'épisode à le viriliser de manière aujourd'hui déplacée. 

Les créateurs de Friends peuvent bien se défendre en disant que justement, c'est le comportement qu'ils/elles voulaient décrier. Plusieurs fois, presque toujours, c'était utilisé à des fins humoristiques comme cet épisode où il se moque de Rachel & Phoebe prenant des cours d'auto-défense alors que lui serait maitre karatéka. Elles lui donnent une raclée. Sa solution ? Prendre des cours à son tour pour "battre" les filles. 

Désagréable individu. Mais personnage probablement construit ainsi. Je ne pouvais pas suivre une série dont je voulais moi-même corriger un des personnages principal et le remonter de toutes pìèces. Personnage qui ne m'a jamais paru sympathique. Que je ne souhaitais PAS voir tomber dans les bras de Rachel. Pour son bien à elle. Il a été amoureux d'une de ses élèves, a fait une liste de pour et de contre de Rachel, a refusé de la divorcer, s'est trompé de nom mariant Émily à l'autel, s'est insurgé contre un gardien d'enfant parce que c'était un mâle, convaincu Rachel que leur couple était en pause quand il l'a trompé, et dans l'épisode final, lui fait encore quitter son emploi.

Wach ! T'es dégueulasse Ross ! Toxique !

Un film que j'avais tant aimé en 1996, que j'en ai acheté le DVD a été aussi une relecture fort différente de nos jours, pour moi.

Jerry Maguire est une petite merde. Et celle qui le pourchasse amoureusement, incarnée par Renée Zelwegger, une potentielle assassine. Il est établi qu'elle est veuve. Il est aussi établi qu'elle a Jerry Maguire en tête depuis longtemps. Le manifeste qu'il rédige au début du film n'est que la confirmation que c'est celui qu'elle croyait qu'il soit, un homme qui a le courage de ses idées. Mais ils ne se connaissent pas. Tant de choses ne fonctionnent pas dans ce film. Elle ne sera jamais autre chose qu'utilitaire pour Maguire tout le film. J'ai 3 des films de Cameron Crowe : Say Anything, Almost Famous et celui-là. Il ne sait pas vraiment écrire les Femmes au cinéma. Dans Say Anything, la belle n'a aucune amie de fille ou presque. Hautement impossible. Elle semble fantasme. Dans Almost Famous ET Jerry Maguire c'est une groupie. 

Il n'y a rien à comprendre de la passion de madame pour Monsieur dans Jerry Maguire. À moins qu'elle ne veuille le tuer. Alors qu'on pense qu'elle n'est que tristement veuve, on apprend plus loin que quand Jerry lui demande d'en parler, elle ne veut pas le faire et que le disparu était un homme horrible. Tant mieux qu'il soit mort, donc ?

Mais quelle piste intéressante ça aurait été qu'elle vise Maguire comme prochaine victime. Les deux ont des pulsions d'harceleurs. Et la misogynie de certaines scènes/personnages est pesante. Mais dans le monde des agents et du sport, la misogynie n'est jamais plus loin que le "juice". 

La "rom-com", qui est davantage un "bro-com" dans une relation agent/joueur, a tout de même généré des lignes cultes de rom-com comme "You had me at Hello" ou "You complete me".   

You had me at hello c'est justement ce que j'ai dit à Shakira quand je l'ai croisée.

Où étais-ce elle qui m'avait dit ça...?

Je dois mentalement relire ce moment afin d'y voir clair. 

Fight Club avait marqué les esprits, mais avec le recul on y voit aussi le germe de l'incel. 

Ross était masculinité toxique "acceptable" pendant 10 ans.

"It may have been, Jones"
Jerry Maguire n'était pas une comédie romantique, une comédie, oui, mais l'amour y était vraiment bonheur d'occasion.

Comme si ça avait été écrit par un gars qui à 16 ans, qui aurait travaillé dans un univers d'adulte dans les année 70...  

La plupart des films/séries sont reflets de leurs époques. 

Ils sont donc sujets à bien entendu, parfois mal vieillir. La relecture est entendue dès le départ. 

Comme ces 2 scènes d'agressions sexuelles presque successives vers la fin de Saturday Night Fever

Autre film largement aimé, mais qui comporte ce sérieux travers.

Confirmant encore qu'un(e) bon artiste, une vraie bonne oeuvre s'inscrit toujours dans la durée.  

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