jeudi 25 octobre 2012

Fly-in Fly-out

28 jours de travail de 12 heures par jour suivis de 14 jours de congé.

Ils sont 50 électriciens à Fermont et dans les alentours qui attendent "l'appel" pour aller travailler dans le Plan Nord.

"Avec le PQ ça marche tu encore le Plan Nord?" a murmuré Valérie à l'oreille de Luc. "Ben certain que ça va marcher, pis on veut y aller t'as tu vu les salaires de malade?"

"Pourquoi vous y allez pas d'abord?"

"Ben là c'est 14 électriciens de l'extérieur, d'Europe, de Chine d'un peu partout qui vont y aller en premier mais après..."

"Pis c'est quand après..."

Valérie voulait du même coup savoir quand perdrait-elle son Roméo. Elles étaient 8 amies de Fermont, qui se connaissaient depuis la petite enfance. La gang des belles du Nord: Val, Sandy, Rosy, Rox, Stef, Mel, Caro et "Agaçe" appellée comme ça parce que son nom était Éléna Lagacé et qu'elle était la plus "agaçe" quand venait le temps de s'accrocher un gars des chantiers.

Elles travaillaient toutes au Casse-croûte Chez Christine sauf Mel et Caro, qui avaient 5 ans de plus que les autres filles et avaient donc dans la trentaine avancée. Ensemble, Mel et Caro s'occupaient d'une garderie. Une garderie tranquille qui n'avait pas beaucoup d'enfants. 6 en comptant le petit garçon de Mel. Un garçon dont elle n'était pas certaine du géniteur.

Quand les boys arrivaient, généralement le vendredi pour une réunion d'avec les boss et un souper, c'était vers 20h00/20h30, dans une salle paroissiale où une soirée en l'honneur des nouveaux arrivants était prévue pour les accueillir, que généralement Val et sa gang de filles les attendaient. Elles s'étaient mises toutes belles, elles se sentaient entreprenantes, sexuelles, aimantes. Stef niaisait tout le temps pour chasser la nervosité du moment en disant des affaires commes "Si je pouvais me mettre une pancarte dans le cou qui dit Vacancy peut-être que les gars comprendraient plus vite!". Caro oubliait toujours d'enlever sa bague de femme mariée. Veuve depuis 9 ans, elle n'avait toujours pas sacrifié cet artéfact dans les soirées mondaines.
À Fermont, c'était soirée mondaine, les gars d'Europe et d'ailleurs ne travailleraient pas avant dimanche et nous étions le vendredi soir. À partir de dimanche, ils travailleraient pendant un mois puis seraient invités à retourner chez eux pour 14 jours de congé. Certains choisiraient peut-être de rester avec celles qu'ils auraient rencontrées sur place. Rosy avait eu dans les pattes Eric pendant 10 jours après son séjour il y a un an sur le projet d'Arcellormittal. À la fin, elle n'en pouvait plus. Elle le trouvait ben cute pis toute mais il devenait drôlement encombrant à venir flâner au Casse-Croute tous les jours. "Tu me promets que tu pars dans 28 jours?" disait-elle à ses conquêtes depuis. Sandy, sa soeur cadette, avait au contraire toujours une larme pour celui qu'elle laissait derrière. Penserait-il à elle? Le reverrait-elle? lui écrirait-il? Qu'est-ce que ça avait donné tout ça? Plus fragile et existentielle, elle rêvait de partir elle aussi un jour dans ces avions qui les transportaient à l'entrée comme à la sortie.

Valérie avait Luc, le chef de chantier, qui restait encore une semaine. Ils s'entendaient à merveille comme si ils avaient toujours été ensemble. Val était gérante du Casse-croûte Chez Christine. Entre deux boss, ils s'étaient tout de suite reconnus. "Agaçe", comme d'habitude, avait attiré l'attention de tout le monde. Avec le temps, elle s'était aussi équipé de deux accessoires 100% vendeurs: un quatre roues et une petite moto.  Oh rien de très impressionnant, mais juste assez pour que les ti-garçons s'excitent davantage dans son entourage. Les autres filles lui laissaient donc toujours le premier choix sans trop de compétition. Drapée d'attention, elle était dans son élément.  

Stef, la comique du groupe, n'avait pas eu trop de difficulté à se trouver un partenaire cette fois-là. "je pense que je suis tombé sur un rêveur!, il parle de m'emmener avec lui en Italie!"
"Oh Non Pas un italien!" à réagi Roxy. "Hého! j'aime ça les italiens moi! Leonardo DiCaprio tu penses que ça vient d'où ce nom-là? Pis regarde comme y est beau" dit Stef en le pointant au loin.
Dans un scénario parfaitement idéal les 8 filles s'attraperaient 8 gars qui sont déjà amis entre eux mais ça n'arrivait jamais. Même que quelques fois, certains gars entre eux ne pouvaient tout simplement pas se sentir. Deux gars en étaient venus aux coups entre les amants de Rox et Mel une fois et les filles s'étaient aussi temporairement brouillées. Mel tenait à se trouver un mec chaque fois, d'abord pour son plaisir mais aussi pour prouver au village qu'elle et Caro n'étaient pas gouines. Elles habitaient ensemble, travaillaient ensemble...
Beaucoup de boyz rôdaient autour de Sandy. Toutes les filles, même Mel et Caro, avaient été engagées pour jouer les barmaids, les hôtesses et les serveuses à cette soirée, et elle vendait peut-être plus que de des consommations...

Quand minuit a sonné et que les boyz ont dû rentrer au camp, tout le monde avait eu de nombreux échanges avec Val, Mel, Stef, Caro, Rox, Rosy, "Agace" et Sandy. "Agace" ne coucherait pas chez elle. Sandy oui, mais avec un beau garçon. Stef et son casanova se garderaient une petite pudeur toute italienne pour la première nuit. Val et Luc trouveraient tout ça ben "cute". Rox avait bien aimé sa discussion avec le timide Antoine et se demandait si elle avait aussi bien paru que lui, lui avait plu. Mel n'avait pas attiré tant que ça mais elle blâmait ça sur sa nouvelle coupe de cheveux. "Mais ils ne la connaissaient pas ton ancienne coupe de cheveux! qu'est-ce que tu racontes?" lui dit Stef. "Oui mais elle ne me met pas en valeur comme avant, j'ai l'air d'avoir un gâteau qu'y a pas levé sur la tête!". Rosy avaient eu beaucoup, beaucoup de prétendants mais semblait avoir été sélective. Personne ne la suivrait chez elle, surtout par le premier soir. Pour elle, les couples commençaient les après-midi à la lumière pas dans la pénombre des bars, la veille dans un parfum d'alcool.

Elles étaient volontaires, mais dignes.

Et Caro avait pour sa part fermé la porte. Elle avait résinstallé sa bague de femme mariée et la pointait quand quiconque semblait lui faire des avances. Ça la fatiguait tout ça. Le jeu de la séduction. Très peu. Si ça arrivait, ça arrivait mais sinon, tant pis, elle ne forcerait jamais la note. D'autant plus qu'elle savait que la plupart des amants de passage avaient déjà des femmes et plusieurs avaient des enfants. Le Luc de Valérie avait deux peties filles à Montréal. Comment vivait-elle avec ça, Val? Il y avait un froid entre Val et Caro. Un froid discret qui se conjuguait avec le froid naturel de Fermont.

On était même pas certain qu'il y aurait vraiment du travail pendant les 28 jours. Le changement de gouvernement, les mauvaises coordinations...

Ils auraient le temps de s'étudier les uns les autres.
Les loups et les gazelles.
Les passagers de la lanterne rouge.

Éclairant Fermont de son "amour"

"Heille c'est bientôt l'halloween, on se déguisera avec les gars!" avait lancé Stef toute excitée.

"On le fait déjà" avait laconiquement laissé tomber Caro, jouant avec son alliance.

Volontaire, mais digne quand même.

mercredi 24 octobre 2012

Trois Chaises Vides Libérales

Pour une rare fois dans l'histoire du parti Libéral, au niveau fédéral et au provincial, les Libéraux, sur trois fronts, sont en mode de restructuration.

Les Libéraux au Québec sont sans chef c'est connu. Charest a quitté son siège suite à sa défaite aux dernières élections et se sont alors pointés trois poulains pour la course à la direction du parti: Pierre Moreau, Raymond Bachand et Philippe Couillard.

Le premier est jeune, charismatique, aimé des femmes (vote crucial) il inspire plus qu'il ne semble avoir de squellettes dans le placard. Il a tout de la jeune vedette montante. Il n'a rien à perdre, si il ne gagne pas la course au leadership, il aura appris et il ne pourrait que se fait que les dents pour le moment. Il s'agit d'un joueur de concession qui saurait attendre son tour avant d'être capitaine de l'équipe.

Le second me semble le choix sans équivoque. Dès le départ du frisé, quand l'amoureuse m'a dit "Qui va le remplacer?" je n'ai même pas réfléchi, ça me semblait aller de soi j'ai tout de suite répondu "Bachand" comme si c'était une évidence. Mais les évidences n'existent pas en politique. On en a pour preuve la vague orange du NPD aux dernières élections fédérales. Je crois encore toutefois que ce devrait être lui qui se place à la barre des libéraux du Québec. Il en a le talent à mon avis. Et la mauvaise foi. Ça peut aider quand on est dans l'opposition. Et Bachand a un passé de péquiste dans le placard. Intérréssant non? Il a donc forcément un peu de bon non? J'aimerais l'entendre là-dessus moi, que sait-il maintenant qui soit mieux chez les rouges que chez les bleus? qu'est-ce qui l'a fait changer d'avis? Que sait-il que les sympathisants péquistes ne savent pas? Peut-il nous faire retourner notre veste? comment?

Non, vraiment, j'aimerais le voir à la barre des Libéraux lui.

Et le troisième, Phillipe Couillard, je l'aimais bien quand il a brièvement passé chez les rouges. Je le sentais "bon parmi les pourris". Toutefois quand il a quitté, il nous as prouvé que la pomme ne tombait jamais trop loin de l'arbre. On ne voyait que le côté rouge de la pomme mais sous celle-ci, il y avait des bouts pochés. Je ne suis plus convaincu qu'il puisse agir avec adresse comme lieutenant du navire Libéral provincial. Il a de plus des amis fantastiquement douteux.

Le parti Libéral  québécois aura un nouveau chef en mars.

En Ontario, coup de théâtre titrait-on la semaine dernière, Dalton McGuinty quitte ses fonctions de premier ministre et chef du parti libéral ontarien.

Surprise? Ben voyons... il pilotait un troisième mandat depuis un an, un mandat minoritaire où l'opposition jouait au plus toton. Il s'agissait de la deuxième fois qu'on lui bloquait des projets en Ontario pour le simple plaisir de le faire chier.  Et il faudrait s'étonner qu'il chie? Pauline devrait y goûter bientôt aussi. On ne fait que mettre la table au Québec mais les Libéraux (sans chef) et la CAQ (sans réalisme) n'attendent que les cuillers pour y mettre de la purée de pommes de terre à envoyer dans la face de la dame au bout de la table.

Vous savez ce que fera McGuinty n'est-ce pas? Pensez-y un peu...Pas plus tard qu'il y a deux semaines il flirtait à se faire des "amitiés" albertaines...des appuis albertains...un libéral...vous ne trouvez toujours pas? Il va se présenter à la course à la chefferie du parti Libéral fédéral! Pour moi ça ne fait aucun doute. Il a 57 ans, l'âge idéal, l'âge de la sagesse. Il connait tous les dossiers canadiens, c'était et c'est encore un gros joueur sur la scène politique canadienne. Et il y a un troisème trou Libéral après celui laissé par Charest et celui, ontarien, que quitte maintenant McGuinty. Il y a une chaise vide dans le bureau-chef de la gouvernance du parti libéral fédéral. One natural step up diraient les chinois.

Et ben finalement non...il veut relever des défis hors du monde politique. Pourtant si il chauffait le moineau Trudeau sur le fil Libéral, il le placerait dans la même position qu'André Boisclair en 2005. Celle de devoir prouver qu'il n'a pas juste la jeunesse à placer devant lui. On connait la suite avec Boisclair...Trudeau est pratiquement aussi creux. Dommage. Il me semble qu'il aurai fait une bien meilleure tête que celle que fera/ferait Justin. N'importe qui ferait une meilleure tête que Justin à bien y penser...

Pas de chef au Québec pour les Libéraux provinciaux, pas de chef en Ontario pour les Libéraux provinciaux, pas de chef au pays pour les Libéraux fédéraux.

Dérive ou réajustement?
Celui qui nous répondra, c'est le temps.

Pendant ce temps les fous ont pris le contrôle de l'asile.
Des vrais désaxés...

mardi 23 octobre 2012

Serge Lefevbre

Québec. 1985.

Nous sommes en plein été entre le secondaire 1 et le secondaire 2.

C'est dans un tout nouvel équilibre mondial que les adolescents que nous sommes viennent de tremper depuis un an. Le passage à la "grande école" nous as fait embrasser quelques filles. De nouvelles sensations ont été découvertes. De nouvelles amitiés. Du hockey compétitif, intense et ponctué d'émotions. C'est une grande année chez les enfants de la cuvée 1972, quoiqu'en pensent les baby-boomers qui foncent vers la quarantaine, quand il n'y baignent pas déjà.

À côté de notre école, il y avait, il y a encore, ce vaste terrain de soccer cerclé d'une piste de course. Au bout de ce terrain: l'aréna de Ste-Foy avec ses patinoires doubles et ce grand terrain derrière qui deviendra quelques 5 ans plus tard l'anneau Gaétan-Boucher. On traine souvent à l'aréna. Moi plus que les autres puisque je suis joueur de hockey dans une ligue et que mon père est instructeur à un autre niveau dans ce même aréna.
Dans cet aréna traine encore plus souvent que moi, Morille*. Son père est policier dans l'édifice qui est si près de notre école secondaire et de l'aréna que le stationnement en est presque conjoint. Morille est si souvent à l'aréna qu'on a des doutes sur sa vaillance scolaire. Il a deux ou trois ans de plus que moi. Il est gardien de but. Il a les cheveux longs dans le cou. Une très mauvaise peau d'ado. Il est non seulement joueur mais il se trouve si souvent à l'aréna qu'on lui a trouvé un poste de marqueur pour les matchs.

Ça lui a comme donné "un statut" dans nos têtes d'ados. Morille portait fièrement un manteau en cuir noir à frange en opérant les matchs. Si on vous avait dit qu'un membre de Mötley Crüe était marqueur du match, vous auriez regardé par deux fois pour vous assurer que ce n'était pas tout à fait vrai. Tout le monde le connaissait. Par tempéremment il jasait à tout le monde et on aimait lui tirer la pipe. C'était un bon-vivant. Un agitateur sympathique.

"Hey Morille tu nous as volé 10 secondes 'à la dernière game!"
"Vous auriez pas compté anyway, vous êtes trop poches!"

Mais en juillet 1985, on est loin de l'école ou du hockey. On est occupé à passer à la phase 2 de nos explorations adolescentines. Surtout celles avec les filles.

Dans la nuit du 3, chez Dépôt Dentaire Canada dans la parc industriel Jean-Talon, l'agent de police Serge Lefevbre est surpris par deux collègues qui répondaient à l'appel d'un système d'alarme. Serge Lefevbre volait. Et pas pour la première fois. Il était entré par effraction et quand Jacques Giguère (43 ans) et Yves Têtu (25 ans) le découvre sur place et le reconnaisse. Lefevbre panique, il était en train de se masturber et les tue en tirant dessus.

Les premiers secours arrivent et Lefevbre, habillé en policier, passe inaperçu puisqu'on croit qu'il est parmi les premiers arrivés sur les lieux. Il va même demander à un journalsite, manipulateur, "Mais qu'est-ce qui se passe donc ici?". Lefebvre quitte subtilement les lieux. Ce n'est que deux jours plus tard que l'information est rendue publique: l'assassin est un policier mais plus grave encore, il est en fuite.
Cette nouvelle a l'effet d'une bombe dans le village mais encore plus dans notre microsociété adolescentine. L'une de mes soeurs sort avec le fils d'un policier de l'endroit, Gargantua Krikofieff, Est-ce que ça pourrait être lui? Quand on apprend qu'on recherche Serge Lefevbre, on est saisi.

C'est le père de Morille...

Dans nos têtes de 13 ans, ça lui a comme donné "un statut".

Serge Lefevbre se cache sous une poutre du pont de Québec, a logé un appel de désespoir à André Arthur et se tire une balle dans le ventre. Ne voulant pas vraiment mourir, il survivra et est arrêté, puis condamné à la prison à vie, 25 ans, sans possibilité de libération conditionnelle. Lefevbre remercie la police de Ste-Foy pour son incompétence à son égard et à l'égard de sa famille.

On a plus jamais revu ni entendu parler de Morille.

Après 17 années exemplaires en prison, son père est libéré.

Il a récidivé plusieurs fois depuis et a été arrêté à nouveau, à Cap-Rouge jeudi dernier, accusé d'entrées par effraction et de multiples vols.

C'est un tout nouvel équilibre mental dans lequel Serge Lefevbre trempe désormais.

Morille, aujourd'hui trois-quatre ans plus vieux que son père quand il a été arrété, je ne sais pas si il s'en tire.
*Sa véritable identité a bien entendu été protégée.

lundi 22 octobre 2012

Portrait des 5 familles de la Mafia de New York (histoire constamment réécrite)

1931.

La prohibition a un effet douloureux sur la culture des États-Unis et devient la rampe de lancement d'une frange violente d'immigrants étrangers. À New York, on y trouve surtout des irlandais (Joe Kennedy, père de JFK, RBK, Ted et cie.) des juifs (Bronfman/Lansky à différentes périodes) mais surtout, fraichement arrivés de Sicile depuis le début du siècle, des italiens, d'abord placés en quarantaine à Ellis Island puis lancé au coeur de Brooklyn.

Les activités illicites sont payantes. D'abord l'alcool de contrebande, puis les paris, les lotteries, la prostitution, la restauration, le tabac, le textile, la construction et plus tard la drogue, les films érotiques, la gestion des déchets et des stationnements. Quand les affaires deviennent violentes, la protection, inventée ou réèlle, rapporte aussi beaucoup. Des guerres de territoires pour le contrôle de l'argent se dessinent. Les morts, 100% des hommes, se comptent par centaines. On présente un travail légitime en surface mais on blanchit par en dessous. On fait des tonnes de sous. Rien de mal aux yeux de ses nouveaux arrivants. On ne fait que se débrouiller. Entre amis. En famille.

Afin de cesser la guerre territoriale de New York, on divise 5 grandes familles réparties sur 5 grands secteurs. Giusseppe Masseria se proclame Capo Di Tutti Capi (chef des chefs), un code d'honneur est écrit et une hiérarchie est créée. Un nouveau monde est né: La Cosa Nostra (chez nous) Salvatore Maranzano et Lucky Luciano ne sont pas d'accord pour qu'il y ait un chef des chefs et préfèreraient une commission qui regrouperait les 5 chefs de chaque famille et celui de la mafia de Chicago pour faire bonne mesure. Maranzano demande à Luciano de faire tuer Masseria et lui promet que par la suite ils se partageront les tâches à part égales. Toutefois quand Luciano organise le meurtre de Masseria en avril, Maranzano retourne sa veste et se proclame Capo Di Tutti Capi à son tour. Luciano ne le voit pas ainsi et 5 mois plus tard c'est Maranzano qui est assassiné.

Les 5 familles sont les suivantes:
Les Lucchese: La famille aura tour à tour de 1931 à nos jours comme chef, Gaetano Gagliano (décédé malade), Gaetano Lucchese (décédé d'une tumeur au cerveau), Carmine Tramunti (per interim), Antonio Corallo (en prison à vie), Vittorio Amuso (en prison à vie), Anthony Casso (en prison à vie) et Louis Daidone (en prison pour meurtre). Steven Crea est l'actuel chef.

Les Bonanno/Massino: Joe Bonanno (décédé à 97 ans en 2002), Carmine Galante (assassiné en 1981), Phillip Rusty Rastelli (décédé du cancer) et Joseph Massino (en prison pour meurtre depuis 2004) sont tour à tour chef de la famille. Celle-ci a des ramifications à Montréal (Les Rizzutos entre autre). Donnie Brasco a infiltré ce clan dans les années 70-80. Vincent Badalamenti en est l'actuel chef.

Les Gambino: Vincent Mangano (coulé dans le ciment), Albert Anastasia (assassiné dans sa chaise de barbier), Carlo Gambino (décédé d'une crise cardiaque en 1976), Big Paul Castellano (assassiné par John Gotti), John Gotti (mort en prison) et son frère Peter (en prison depuis 2004) ont tour à tour été chefs de la famille. Le chef actuel est Domenico Cefalu.

Les Luciano/Genovese: Lucky Luciano (décédé d'une crise cardiaque en 1962), Frank Costello (qui se retire après une tentative d'assasinat commandé par Vito Genovese), Vito Genovese (décédé en prison), Benny Squint Lombardo (retraité dans les années 80), Vincent Chin Gigante (qui avait tiré sur Costello et qui meurt en prison) ont tour à tour été chefs de la famille. Le chef actuel est inconnu.

Les Profaci/Colombo: Joseph Profaci (décédé du cancer en 1962), Joseph Colombo (Paralysé après avoir été tiré au fusil en 1971), Carmine The Snake Persico (en prison à vie), Alphose Little Allie Boy Persico (en prison) ont tour à tour été chefs de la famille.  Andrew Russo est le chef qui suit les ordres de Carmine Persico dictés de prison. 

Les familles opèrent principalement dans les 5 districts de l'île de Manhattan. Brooklyn, Queens, le Bronx, Staten Island, Long Island, Westchester County, le New Jersey, le Connecticut, La Floride, Los Angeles, Montréal, Laval, Toronto, Thunder Bay, Rockland County, Greenwich Village sont les principaux secteurs d'activités de la mafia.

Les oscarisés films de Françis Ford Coppola de 1972 et 1974, ainsi que les histoires de Mario Puzo sont inspirés de la dynastie des Borgias mais les Corleones ont aussi beaucoup en commun avec l'histoire des Bonanno. Les 5 familles sont représentées dans l'oeuvre de Puzo et les films de Coppola. Le rôle de Marlon Brando, son look, sa manière de parler, est toutefois inspiré de Simone DeCavalcante, chef du crime organisé du New Jersey*.

La série des Sopranos est pour sa part entièrement inspirée de l'histoire du clan DeCavalcante du New Jersey (sauf le look du boss).

Dans la série de jeu Grand Theft Auto, (la première et la quatrième) les 5 familles sont aussi déguisées en familles fictives.

On a souvent une vision romantique de ces rebelles du système. N'oublions jamais qu'ils tuent sans scrupules au nom d'une loyauté toujours disscutable et sont attirés par un appât du gain aussi mortel qu'immature.


C'est en 1957 que la mafia devient réellement publique aux États-Unis.
Au Québec, avec Vito Rizutto maintenant libre et peut-être en quête de vengeance, avec la commission Charbonneau, on commence à faire 1 et 1 dans le milieu politique, le milieu des affaires et le milieu de la construction.

Même si depuis tellement longtemps on savait,
on ne l'avait juste jamais complètement entendu.

*Physiquement, James Gandolfini/Tony Soprano ressemble davantage à Nucky Johnson, personnage qui a inspiré Nucky Thompson dans Boardwalk Empire.

dimanche 21 octobre 2012

L'Impuissante

J'avoue avoir à me forcer par les temps qui errent pour aimer le nouveau gouvernement en place.

Oui je parles du PQ.

Je sais, je suis le premier à les avoir souhaité là où ils se trouvent. Je suis de ceux qui croient (croyaient?) qu'on a beosin de plus de femmes en poste de leader. Toutefois je me suis surpris l'autre jour à prendre grand plaisir à voir répondre Jean-François Lisée aux questions des journalistes au sommet de la francophonie. Qu'attends-t-il celui-là pour être califfe à la place du califfe? Le strapontin, ça ne lui va pas totalement bien.

Parce que Pauline brille par sa pâleur vous ne trouvez pas? Elle est plutôt nulle part et quand elle est au micro, elle manque cruellement de bons "clips" à présenter aux nouvelles. Est-ce une question de mauvais montage? de mauvaise foi de la part des journaleux? Bref, la reine est un peu triste à voir aller.

Mais pas autant que certains de ses subalternes. Marie Malavoy pour ne pas la nommer.

Ta
Bar
Nak.

Cette femme est tout simplement effrayante. Qu'elle mette en doute l'expérience de l'anglais intensif en 6ème année est une chose. Ça se discute, c'est selon. On aime où on aime pas, ça regarde chacun et elle a le droit de questionner l'efficacité de la chose. Mais quand elle parle de cette "langue étrangère" elle parle de la peur qu'elle a de l'anglais. Une peur ancestrale de pense-petit qui remonte au début du siècle quand les méchants anglais abusaient des petits français. Une réflexion qui est parfaitement inexistante chez une large frange de la population de tous âge. Je vous l'écris pour la 459876759ème fois: APPRENDRE UNE NOUVELLE LANGUE N'EST PAS RÉDUIRE LA LANGUE ORIGINALE, C'EST ÊTRE PLUS RICHE.

PLUS RICHE
PLUS RICHE
PLUS RICHE
PLU$ RICHE$

Chez certains quidams c'est dur à comprendre. Quand l'anglais vous échappe, vous vous sentez vulnérable, faible, petit. Si votre indépendance est pour se dérouler seulement en français rangez-là tout de suite au placard, elle n'aura jamais lieue.

The revolution will not be televised.

Vous ne l'avez peut-être pas comprise celle-là, elle était en langue étrangère. Comme dans extirpée d'une autre planète. Je ne me sens personnellement jamais plus étranger qu'en compagnie de français de France. Nos tempéremment sont aux antipodes. Nos valeurs aussi. Mais en présence d'Américains, pas même d'Étatsuniens, d'habitant d'Amérique, je suis quand même chez  nous. Malgré nos énooooooooormes différences, en Amérique c'est chez moi. Et en Amérique, c'est 98% en anglais et 2% en français, qu'on aime ou non. Quand j'entends madame Malavoy parler en "trou de cul de poule" je la crois, elle, étrangère à moi. Je ne suis PAS français de France, je suis Québécois d'Amérique. Mes ancêtres ont peut-être été colonisés, ont été français aussi, voilà pourquoi je parle une variation de la langue de Molière, une maudite belle variation de la langue de Molière, une langue exceptionnelle à la hauteur de mon peuple tout aussi exceptionnel. Mais la peur de la langue de "l'envahisseur" je ne la connais pas. Parce que pour moi elle n'envahit rien, au contraire, elle transporte quiconque à des ambitions partout dans le monde. Partout sur terre. Et plus loin encore. Felix Baumgartner est autrichien, il a jasé dans la langue de Shakespeare avant son saut plus ou moins utile. Shakespeare c'est ce fantôme que vous voyez dans vos cauchemars, la nuit madame Malavoy, you strange bird, pas une chanteuse pop.

Tout ce qu'elle a raconté la semaine dernière relevait de la mauvaise blague. Je n'y ai pas cru pendant deux jours, plusieurs n'y croit pas encore. Ces propositions en tant que ministre de l'éducation sont tellement farfelues que certains concluent à une stratégie de bordel volontaire. Enlever l'apprentissage de l'anglais dès la première année: non. Vouloir couper les subventions aux écoles privées et ramener les élèves qui y sont au secteur public: non plus. C'est  une lâche hérésie. Voilà une belle manière de se dédouaner d'un examen de conscience sur le système d'éducation dans son ensemble. Et difficile de ne pas penser que d'éliminer une certaine sélection n'est pas un nivellement par le bas. Crois-t-elle que sur le futur marché du travail, ces jeunes ne feront pas face à des sélections de tout genre afin d'aspirer à leurs rêves de carrière?

Il est d'un autre monde le rêve de Marie Malavoy.

Et son idée de parler de la souveraineté dans les cours d'histoire est une farce qu'il faudrait franchement taire. Raconter quoi? comment une nation, la seule sur terre, peut refuser pas une mais DEUX fois de devenir pays? Un cours sur la honte ou la fierté? Comment on se l'est fait volé en 1995?

Les partis politiques ne devraient jamais, jamais, jamais , JAMAIS, se mêler des cours d'histoire*. Allez demander aux Serbes si les Albanais kosovars existent dans leurs livres d'histoire. C'est là que commence le révisionisme. Dans les pays les plus discutables on réécrit l'histoire afin d'endoctriner les plus jeunes. Endoctriner comme dans brainwasher. Eux c'étaient les bons et eux les méchants. Marie voient encore les anglais comme les méchants, la pauvre petite.

Il faudra parler de la souveraineté dans les cours d'histoire quand elle sera survenue. Pas l'inventer avant l'heure.

Cette femme est passée dans l'actualité la semaine dernière comme la plus grosse fausse note d'une chorale qui a déjà des problèmes à tenir la note juste.

Marie Malavoy était en tout point, dans les visées, dans les propos, dans le ton et dans la pertinence, étrangère à tout tout tout tout tout ce que je suis.

Moi et bien d'autres intéréssés par le monde entier.
Pas juste par ce qui passe au salon à Outremont.

À Westmount aussi. De l'autre côté de la rue, madame.
À Londres, New York, Hong Kong, Paris, Singapore, Dehli, Genève, Butha-Buthe, Médine, Moscou, Shangaï, Reikjavik, Pékin, Berlin, Dublin et Sydney.

Si tu veux toucher à l'anglais qui pollue pour vrai, Malavoy, attaque le CRTC qui considère que les chansons bilingues qui passent à la radio sont des chansons françaises.

ÇA c'est un crime.

*Ils n'ont pas plus leur place ici.

samedi 20 octobre 2012

John Cheever

Le centenaire de la naissance de l'auteur John Cheever était célébré en mai cette année à Quincy au Massachusetts.

Cheever était principalement auteur de nouvelles , probablement l'un des meilleurs d'Amérique avec Carver et Updike. On le dépeignait comme le Tchekhov des banlieues.

Cheever était le fils d'un vendeur de souliers raté et alcoolique et d'une mère tenanicière de boutique de cadeaux cheaps. Très jeune, il a compris le complexe d'infériorité et les ambitions noyées dans l'Amérique d'après-guerre. Il pouvait être très drôle à propos de l'ennui dévastateur des banlieues composées de gens stupides, déprimants et sans imagination mais il était beaucoup plus qu'un simple critique de l'abrutissante vie des faubourgs. John Updike dira de lui que bien des gens ont écrit sur la banlieue mais lui seul, à réussi à en faire un archétype vraisemblable.

Cheever avait adroitement saisi les bouillantes envies de la classe moyenne américaine et ses observations sont encore, à ce jour, très justes. Dans The Housebreaker of Shady Hill, un homme rongé par la jalousie, se glisse dans la nuit dans la chambre du couple voisin afin de subtiliser de l'argent à même le portefeuille du couple endormi.
Il est aussi excellent raconteur. Dans The Swimmer (adapté en film en 1966) il ouvre son livre avec la ligne : "C'était l'un de ses dimanche après-midi d'été où vous vous asseyez en vous disant "J'ai vraiment trop bu hier soir".

L'alcool est un thème récurrent de ses oeuvres et de sa vie privée. Son frère était un gros buveur et Cheever lui-même était alcoolique. Il se décrivait lui-même comme un buveur solitaire afin de surmonter ses crises de paniques et son manque de confiance. Le gin était sa seule sortie de secours selons ses propres dires. Il s'est presque tué à la bouteille avant de se resaisir suite à un passage au Manhattan's Smither's Alcoholism Treatment and Training Center. Sobre, il a écrit le brillant roman* Falconer en 1977 s'inspirant de ses stages d'enseignement faits à la prison de Sing Sing.

Cheever avait aussi une double vie. Bien que marié et père de trois enfants, il était bisexuel. Des années après sa mort, dans un épisode de la série Seinfeld, George révèle par inadvertance que le père de son amoureuse a eu une aventure homosexuelle avec John Cheever. Ironie suprême, le personnage de Don Draper dans la série Mad Men, un homme lourd de secrets, habite la ville de Ossining, là où Cheever a lui-même passé une large partie de sa vie. Un ami, Lupus Stradivarius, qui s'apprête à me passer un livre de ses nouvelles me disait justement qu'il y a définitivement un "mad men vibe" dans ses écrits.
Les personnages de Cheever, comme lui, sont souvent envahis par des secrets lourds à porter. La banlieue est toujours en faux-semblant. Cheever peignait cette réalité admirablement.

Dans The Enormous Radio, un couple de New York s'apperçoit qu'une fréquence de leur radio est en mesure de faire entendre les voisins. Indigestion, ébats sexuels, vanité abyssale, espoir et desespoir, tout y passe, le couple entend tout de ses voisins. Dans cette histoire, Cheever révèle cliniquement et subtilement que le couple qui espionne est tout aussi abâtardi que ses voisins. Que dirait-il de la téléréalité aujourd'hui?

Cheever était capable de beaucoup d'humour et d'autodérision. Il se disait lui-même un simple plouc, plutôt chanceux. Falconer, Bullet Park et la série des Wapshot ont été ses efforts les plus salués mais là encore, Cheever considérait que ses autopsies de la désintégration de l'homme d'affaires dans la quarantaine ne valait en rien le génie de son ami Saul Bellow. Complexe d'infériorité...jamais très loin.

Ceci ne l'a pas empêché de se mériter la médaille nationale de l'American Academy of Arts and Letters. Plusieurs de ses nouvelles tentend de donner un sens à sa propre vie et à soigner ses défauts tout en vivant dans l'impossible simplicité.

Bien qu'il était capable de fairer resortir le plus laid de l'homme, il était aussi un homme d'une très grande humanité.

En Juin cette année, le jour d'anniversaire de mon père, marquait le 30ème anniversaire de la mort du grand Jonh Cheever. Il avait 70 ans.




*Il n'a écrit que 5 romans: The Wapshot Chronicles (1957), The Wapshot Scandal (1964), Bullet Park (1969), Falconer (1977) et Oh What a Paradise it Seems (1982)