Il avait la tête du Colonel Sanders.
Il avait les yeux d'un bleu/vert très très clair.
Il avait un regard unique.
Ayant passé une large partie de sa vie au Kansas, dans les années 30, il a baigné dans le jazz, un genre qui me plait beaucoup, vous le savez. Il rendra hommage à cette période de sa vie, tard dans sa carrière.
J'ai adoré Robert Altman.
Moins son cinéma, inégal, que l'homme.
Il savait se tenir debout.
Après avoir connu un immense succès avec M*A*S*H* il n'a pas hésité à dénigrer la série télévisée qui en est née, qui dénaturait selon lui tout le propos anti-guerre de sa comédie. Selon plusieurs de ses proches, on lui a refusé des Oscars en raison de ses positions très claires anti-Vietnam, anti-invasion en Irak. Peu importe, Altman devait lui-même s'en moquer.
Quand il a réalisé Popeye pour un grand studio (Paramount/Disney), il n'a pas hésité à ouvrir sa gueule pour dire à son producteur que ce qu'il tournait était de la merde. Vrai, cette comédie musicale est d'une nullité grotesque.
Mais Altman était solide. On lui avait planté le réalisateur Paul Thomas Anderson à ses côtés quand Altman a tourné son dernier film car, passé 80 ans, on ne savait trop si il allait mourir sur le plateau. Il complétera le film sans problèmes. PTA dédiera There Will Be Blood au grand maître.
Le réalisateur filmait si bien son pays que trois de ses films sont préservés dans le registre national des films des États-Unis: M*A*S*H, McCabe & Mrs Miller et Nashville.
Acides satires de la contreculture d'Amérique, Altman privilégiait les conversations naturelles où les comédiens pouvaient improviser du dialogue, hésiter, se couper et même se tromper, comme dans la vraie vie. Vraie vie qu'il avait étudié et pratiqué pendant 17 ans dans le documentaire et le court-métrage avant de tourner son premier long métrage de fiction.
Le Cinéma d'Altman était un cinéma de non-conformiste et d'insoumis.
Et comme cette race est généralement horriblement mal distribuée en copie DVD, il est très difficile de trouver ses films, même dans les grandes villes comme Montréal.
Voici Altman pour moi en 5 films, je n'ai toutefois vu que 12 de ses 34 fictions.
5. The Player/Short Cuts. 1992 & 1993
Bon, ça y est, je commence par une tricherie. Je vous en offre deux d'un coup. Mais c'est que les deux films sont nés de l'univers de deux écrivains qui étaient presque cousins. Du moins de plume. Micheal Tolkin et Raymond Carver. Dans le film de Tolkin, on suit un producteur menacé anonymement et peu à peu paranoïaque dans une critique acerbe d'Hollywood avec des tonnes de brillants caméos et un plan d'ouverture fantastique. Un grand film. Dans le second, adaptation de nouvelles de Carver*, d'une durée de plus de 3h avec 22 personnages d'importance, traite de la chance, du hasard, de la mort, de la fidélité et de son contraire et est tout à fait de son époque. Altman sera en nomination pour l'Oscar du meilleur réalisateur pour ses deux films.
4. The Long Goodbye. 1973
Leigh Brackett avait co-scénarisé le script du film The Big Sleep en 1946 qui mettait en vedette le suave Humphrey Bogart dans le rôle du détective Philip Marlowe, création de Raymond Chandler. La scénariste est réutilisée ici, mais dans le but avoué de faire de Marlowe un sympathique perdant. Cette étude du déclin de la morale d'un homme trempé dans un Hollywood qui implose dans l'obsession du culte de la personnalité, là où on peut ruiner la vie de l'un en un clin d'oeil et où la loyauté et l'amitié est inutile, met en vedette un hilarant Eliott Gould dans le rôle de Marlowe, Sterling Hayden, Nina Van Pallandt, Jim Boulton (un joueur de baseball!) et Mark Rydell (futur réalisateur qui a dans ce film une scène d'une cruauté inhumaine). Très 70's.
3. Gosford Park. 2001
Deux ans auparavant, l'acteur Bob Balaban approche Altman et l'implore de travailler avec lui. Altman lui demande donc de préparer un meurtre et mystère dans un manoir impliquant une étude des classes sociales. Agatha Christie croisé avec Jean Renoir. L'histoire, inspirée aussi de la série culte britannique Upstairs/Downstairs, sera scénarisé par l'acteur/écrivain Julian Fellowes (scénariste pour la première fois) l'action se déroulera au début des années 30. Fellowes, qui créera ensuite Downton Abbey comme un spinoff de ce film, écrit avec beaucoup de finesse des personnages bourgeois et une équipe de bonnes et de valets exceptionelle dans un casting de rêve comprenant Helen Mirren, Alan Bates, Charles dance, Eileen Atkins, Stephen Fry, Michael Gambon, Richard E.Grant, Derek Jacobi, Kelly MacDonald, Ryan Phillipe. Clive Owen, Jeremy Northam, Kristin Scott Thomas, Emily Watson et Maggie Smith. (Cette dernière sera aussi de Downtown Abbey reprenant pratiquement le même rôle). 7 nominations aux Oscars. Chic.
2. Three Women. 1977
Ce film fût d'abord un rêve de Robert Altman qui n'en avait pas complètement saisi la pertinence. Peu importe, il choisit alors de mettre son rêve en scène dans un village désertique de la Californie et nous présente deux co-locataires, Sissy Spacek et Shelley Duvall, 100% différentes, dont les traits de personnalités subiront de profonds changements à se côtoyer, et à côtoyer une troisième femme, une artiste peintre interprétée par Janice Rule. Le film est effectivement aussi planant qu'un rêve. Ambient, mystérieux, il a une certaine parenté avec le cinéma de David Lynch. Voilà peut-être pourquoi il a fait si grande impression sur moi.
1. Nashville. 1975
5 jours dans la vie des gens entourant l'univers de la musique country et la ville de Nashville. 25 personnages d'importance dans son film le plus inspiré de l'univers documentaire qu'il eût tourné. Inspirés des réels personnalités qui peuplaient Nashville en 1974, le film d'Altman est un véritable pouls de l'Amérique de l'époque dans le Tennessee. Le personnage joué par Henry Gibson (Haven Hamilton) est inspiré de Roy Acuff, Hank Snow et Porter Wagoner, celui de Ronee Blakeley (Barbara Jean) est inspiré de Loretta Lynn.; Le chanteur country noir Tommy Brown (joué par Tim Brown) inspiré de Charley Pride, le trio folk de Peter, Paul & Mary, le couple marié au sein du trio inspiré de Bill Danoff et Taffy Nivert (plus tard devenu Starland Vocal Band), Keith Carradine joue un personnage influencé par la personnalité de Kris Kristofferson et Connie White (inteprétée par Karen Black) ressemble énormément à Lynn Anderson. Une série télé est actuellement en ondes inspirée de ce grand grand film.
Grand Grand Homme.
Je voudrais voir McCabe & Mrs Miller, Quintet, A Wedding.
Il tournait son tout premier documentaire il y a 65 ans.
*Un nouveau recueil de nouvelles regroupant toutes celles illustrées dans le film sera lancé par la suite.
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Parce que des enfants pas tellement doués pour l'expression francophone et frôlant la débilité pure se sont infiltrés sur ce site je me vois forcé de modérer les commentaires :)