Cinema Paradiso**********The Usual Suspects de Bryan Singer

Chaque mois, dans ses 10 premiers jours, tout comme je le fais pour la littérature (dans ses 10 derniers) et tout comme je le fais pour la musique, je vous parles de l'une de mes 3 immenses passions: le cinéma.

Je l'ai surconsommé (le surconsomme encore), étudié, en fût diplomé, y ai travaillé, en fût récompensé, en suis sorti, mais le cinéma n'est jamais sorti de moi.

Je vous parles d'un film dont j'ai aimé l'histoire, la distribution, la réalisation, les thèmes, l'audace, le montage, la cinématographie, bref, je vous parles d'un film dont j'ai aimé pas mal tous les choix. 

THE USUAL SUSPECTS de Bryan Singer.

L'unique survivant d'une tuerie dans le port raconte l'histoire du réputé Keyser Soce et son influence sur les évènements entourant sa bande de 5 criminels qui se rencontrent pour la première fois quand ils font un line up policier où on doit identifier un suspect.

C'est immortalisé sur l'affiche du film.

Kevin Pollack est Todd, William Baldwin est Micheal McManus, Gabriel Byrne est Dean Keaton, Benicio Del Toro est Fred Fenster et Kevin Spacey est Verbal Kint. 

C'est en rencontrant Spacey dans un cocktail de L.A. que ce dernier dit à Bryan Singer et au scénariste Christopher McQuarrie, qu'il serait prêt à jouer dans n'importe lequel de leur futur projet, il a adoré Public Access qu'il a vu au dernier Festival du film de Sundance. Le dernier effort créatif commun de Singer et de McQuarrie.

Ce dernier écrira son personnage avec lui en tête. C'est Klint qui nous raconte Keyser Soce et sa bande. Dans lequel il fait aussi partie. On offre le rôle de l'agent de police à Christopher Walken, Tommy Lee Jones, Jeff Bridges, Charlie Sheen, James Spader, Al Pacino et même Johnny Cash. C'est à Chazz Palminteri qu'on offrira finalement le rôle. Pacino dira que c'est l'unique rôle qu'il aura regretté d'avoir refusé. Bryan Singer n'est pas, en 1994, un réalisateur qui a déjà un nom de bien établi. Ni une oeuvre ample. Mais à déjà de mauvaises habitudes. Nous y reviendrons.

Spacey passera plusieurs mois en compagnie de gens atteint de paralysie cérébrale afin de bien rendre son personnage. Il gagnera même son premier Oscar pour ce rôle secondaire (il en gagne un second, dans un rôle principal, en 1999) Dans la scène du line up policier, Singer et McQuarrie ont choisi de ne rien dialoguer et de les faire improviser naturellement entre eux. Pollack et Baldwin passent leur temps à dire des conneries ce qui fait décrocher et rire tout le monde. Le jeu est de faire décrocher l'Irlandais Byrne, qui est le plus sérieux du groupe. Les séquences seront gardées. 

Un second Oscar sera gagné pour ce film et c'est celui du meilleur scénario original, car oui, c'est une histoire intelligemment ficelée. Le Writers Guild of America placera ce film au 35e rang des meilleurs scénario de tous les temps. Rarement la légende urbaine n'a été traitée avec autant d'habileté. L'humour est aussi bien dosé. Et on croit à ses personnages de petites merdes du monde criminel. 

Le personnage de Keyser Soce a été écrit avec en tête la triste histoire vraie de John List. Le film, dans sa structure narrative, est un croisement de Rashomon et de Double Indemnity. Le nom de Soce est inspiré du vrai nom d'un ancien patron de McQuarrie. 

On a tourné le film en 35 jours, à Los Angeles, San Diego et New York. Palminteri n'était disponible que 6 jours et a tourné ses 6 jours du matin au soir. Le directeur photo Newton Thomas Sigel y va de multiples zooms, à toutes les vitesses possibles, parfois extraordinairement subtils, afin de créer un sentiment de mouvement là où il n'y a surtout, que du verbe. Parfois les zooms sont presque imperceptibles, mais on réalise qu'on est soudain, en plan rapproché. 

Byrne dira, des années plus tard, que le tournage sera suspendu au moins 2 jours car Kevin Spacey avait harcelé sexuellement un jeune travailleur sur le plateau contre son gré. Une autre version, de Kevin Pollack, dit que Spacey avait plutôt fait des avances à l'amoureux de Bryan Singer, un mineur. Peu importe, les deux, Spacey et Singer, seront emportés par la vague #MeToo d'agresseurs.

Mais ce film, sa réalisation, son histoire, sa distribution, qui comprendra aussi Pete Poslethwaite, Suzy Amis et Giancarlo Esposito, vaut le détour. 

Noir, drôle, triste, rusé. 

Ce film a 30 ans, cette année.