dimanche 30 mai 2021

Nous


Quand je pense à l'école, entre mes 6 et 20 ans, mes souvenirs ne sont qu'heureux. Ce n'est peut-être pas le cas pour tout le monde, le concept de passer du confort familial, qui n'est une garantie non plus, à une socialisation forcée dans un cadre scolaire d'apprentissage avec des étrangers de son âge qui deviendront peut-être des amis, n'est pas forcément vécu agréablement pour tous.


Alexandra Diaz, les jumelles Gamache, Saskia Thuot, Miro Lacasse, Patrice Dubois, Geneviève Billette, Frédéric De Grandpré, Bruno Marcil, Bobby Beshro, Suzanne Gagné, Anne Gauvin, Annie Dufresne, Frédéric Ouellet, Elizabeth Rancourt, Vincent Huot, sont tous un échantillon des gens que j'ai côtoyé à l'école, qui depuis, sont devenus des personnalités publiques connues, au Québec.


L'école c'est pas seulement de l'apprentissage, c'est un bain de société. Je le remarque avec les gens que je côtoie au travail. Quatre de mes collègues sont décrocheurs. L'un d'entre eux est tout simplement incapable de dire "Google".  Gougueule.  Il dit continuellement "goggle". Qui voudrait dire en anglais lunettes de protection ou lunettes de baignade. C'est comme un tic verbal incontournable pour lui: Gars-gueule. Une frontière qu'il est incapable de franchir. Le "ou" de Google. Le même gars nous a plongé dans la confusion la semaine dernière en parlant d'un collègue au travail analogue du bureau chef du 418, qui quittait finalement ses fonctions, ce qui le laissait un peu déçu. Il a dit "Avec son départ, je perds maintenant mon aumonier". Ça nous as pris quelques instants avant de considérer davantage cet ange qui passait soudainement dans la pièce, une enclume sur le dos. "Que...que voulais-tu dire?" a risqué quelqu'un. On a tous fini par éclater de rire, quand on lui a expliqué ce que voulait dire aumonier. Je lui ai demandé si il visait homologue, mais il m'a répondu qu'il visait plutôt le mot homonyme. Qui est aussi une erreur. Un homonyme, ce sont deux mots qui sonnent pareils. Vers-vert. Cool-coule. Amende-amande. C'est aussi deux personnes qui auraient le même nom. Alexandre Despatie-Alexandre Despatie, Patrick Roy-Patrick Roy, Richard Séguin-Richard Séguin. Ces trois cas ont été des gens de mon entourage, mais par le plongeur médaillé, pas le joueur de hockey* et pas le chanteur.


L'école, qu'on y soit bon en notes scolaires ou non, c'est de l'apprentissage sociétaire. On apprends d'abord et avant tout, le nous. Le vivre ensemble. 

C'est ce que projetais d'apprendre aux enfants autochtones, entre 1870 et 1969, le Canada d'Amérique avec son pensionnat de Kamloops. Le vivre ensemble, le Nous. Mais quelle catastrophe. 


Catastrophe est même, fort probablement, un mot beaucoup trop faible pour parler de l'horreur de ce mouroir qu'est devenu ce pensionnat de Kamloops. Quand on pense à cette école, le premier mot qui vient à l'esprit est le mot mort. Un mot tout à fait impossible à associer, pour la plupart des gens sur terre, à l'école, en général. Il ne s'agit même pas d'un hôpital. 


De 1969 à 1978, le gouvernement a pris le contrôle de l'établissement de l'église catholique et en a fait un pensionnat. Près de 500 étudiants auraient fréquenté les lieux par année. C'était des tous des autochtones. En 2008, on découvrait que près de 50 morts s'étaient assurément produites sur ce lieu. Des morts d'enfants. Les dossiers opaques de l'église catholique empêchent tous le monde de savoir comment et surtout, pourquoi 50 morts peuvent survenir dans une école. Aucun dossier. Pas même des dossiers de disparitions. On a rien documenté. Les enfants ont été envoyés au pensionnat, ne sont jamais revenus. On a pas donné suite aux parents qui s'en plaignaient. Atroce. 


Le Centre National pour la Vérité et la Réconciliation a recensé des milliers de décès d'enfants dans les écoles sur cette période mais la vérité serait pire encore. Comme si tout ça était normal. La semaine dernière, on a fait affaire à une firme d'expertise par radar pour sonder les sols et on découvrait avec stupeur les restes humains de 215 enfants, dont certains de l'âge de 3 ans...

Avec cet hôpital de Joliette qui, en ce moment, au Québec, refuse de croire qu'on parle de leur hôpital comme d'un hôpital de blancs, ce qui exclurait tout systémie, serons nous capable de faire face au miroir, un jour?


C'est bien nous, ça? Qu'est-ce que ça dit de nous?

Le Canada d'Amérique?

Le Québec d'Amérique?

Le mal blanc, peut-être aussi. 


Tuer? Négliger jusqu'à la mort? Rien à voir avec l'éducation. 

Savoir ce qui s'est passé, oui. 

C'était écrit dans le journal en 1907. 

"La peste blanche" jamais soignée chez les autochtones. 

À la Une du journal.     

Inattention. Comme toujours, avec les autochtones. Et les Femmes disparues? 

On s'intéressera aux Femmes autochtones disparues et assassinées, de nos jours? Qu'est-ce que ça dit de nous?


*mes parents, en revanche, connaissent bien sa mère, Barbara. 

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Parce que des enfants pas tellement doués pour l'expression francophone et frôlant la débilité pure se sont infiltrés sur ce site je me vois forcé de modérer les commentaires :)