jeudi 9 août 2018

Dario Argento Trio

Plus jeune, les films d'horreur m'amusaient beaucoup.

Ils m'amusent encore un peu.
Pour citer un vieil ami, I was so much older then, I'm younger then that now.

J'ai choisi de me taper un festival de films comme on le faisait entre amis fin des années 80, début des années 90. On se prenait trois films du même réalisateur et on se tapait son oeuvre le temps d'un week-end. Comme l'amoureuse quittait pour Québec afin de revoir une amie de Singapour de passage, que Monkee était à Osheaga et que Punkee était en Europe, je me retrouvais seul.

Avec mes trois films de Dario Argento...

Dario Argento est un réalisateur/scénariste, producteur et critique de film italien qui a connu ses heures de gloire dans les années 70 et 80, plus particulièrement dans le sous genre d'horreur giallo.  C'est-à-dire à la frontière du cinéma policier, du cinéma d'horreur et du film érotique. Giallo veut en faire dire "jaune". Car effectivement, il y a un côté fondamentalement cheap à la production de ses vieux films. (Il tourne encore, deux nouveaux depuis moins de 12 mois seulement, dont un remake d'un de ses meilleurs). Le sang ressemble beaucoup à de la peinture. Les close-ups sont parfois grossiers. Le son, dans la tradition du néo-réalisme italien, semble peu souvent en direct et le jeu est presque toujours assez mauvais.

Ses films ne me font pas peur, ils me font même souvent bien rire. Les figurants tout souriants, les enquêteuses, fusil en main, sacoche sur l'autre épaule, les erreurs de tournage parfois mal cachées. L'éclairage de ses films est très souvent naturel, ce qui rend ses films plus réalistes encore. Et leur donne un caractère glauque plus important. Dans presque tous ses films, il y a un tueur dont on ne verra jamais le visage, tout vêtu de noir, tuant sans motifs précis, avec ses gants noirs. Ce personnage est joué par Argento lui-même, tous les plans de mains assassines sont aussi les siennes. Ce qui donne à ses films une signature inconfortable.

Je crois que c'est ce que j'aime des films d'Argento. L'inconfort qu'il projette sur nous. La musique, extradiégétique, est souvent très intéressante. L'orgue y trouve une belle place. On ne croit jamais au sang, mais on croit à l'angoisse. Un chien qui saute avec effervescence dans les vitres pour manger une jeune femme, un cadavre sous l'eau, souriant, menaçant d'entrer en contact avec une jeune femme cherchant une clé dans une salle de bal sous-marine, une très jeune Jennifer Connelly de 15 ans ravie de se trouver parmi les mouches...Dario offre toujours quelques perles ici et là.

Sa fille Asia en est une, selon moi.

Les trois films que je m'étais choisi étaient de 1980, 1982 et 1985.

Des années formidables dans la construction de ma personne.

Des films que je voyais pour la première fois
(sauf Phenomena dont je n'avais pas souvenir, mais qu'un ami m'a confirmé qu'on avait vu ensemble).

Inferno
L'histoire d'un jeune homme enquêtant sur la disparition de sa soeur à New York et qui habitait le logement d'une sorcière de plus de 100 ans. Deuxième partie de la trilogie des Trois Mères, qui inclut Suspiria (en première partie) et The Mother of Tears (pas vu, dernière partie). Trilogie dont la narration est librement inspirée de Thomas de Quincey et son livre Suspiria de Profundis, publié en 1845. Mario Bava a beaucoup tourné ce film puisque Argento souffait d'une hépatite et était obligé au lit à l'hopîtal pendant le tournage. Des trois, c'est celui que j'ai le moins aimé, mais c'est aussi celui qui demandait peut-être à se rappeler de Suspiria.

Tenebrae
Un écrivain voit un meurtrier copier les meurtres que l'écrivain scénarise en livre. Film fort intéressant mettant entre autre en vedette un transgenre aux souliers rouges dans des scènes de flashbacks. Le jeu est extrêmement inégal entre acteurs. Anthony Franciosa et John Saxon paraissant nettement plus professionnels que Daria Nicolidi ou ce mort masculin en voiture* qui méritait la mort simplement parce qu'il était poche. On ne l'a même pas crédité au générique. J'ai d'ailleurs constaté que j'ai toujours confondu John Saxon et Micheal Ironside. Deux acteurs dont j'aime beaucoup la tête de série B. Ils ont d'ailleurs tous deux joué dans plus de 200 films, tous des films de qualité extraordinairement moyenne. La musique de ce film est fameuse et la twist de sa conclusion aussi. J'ai revécu mes 10 ans à l'oreille et parfois, à l'oeil**. Une longue scène mettant en vedette John Saxon m'a rappelé mes 10 ans, et l'époque des patins à roulettes. Ironiquement, dans cette scène, deux femmes passent en patins à roulettes à un certain moment. Les longues scènes sans textes sont nombreuses dans les films de Dario et dans celui-ci, ces scènes sont formidablement kitchs. Une main tranchée sera extra ketchup, je vous préviens. C'est la mort sur grand écran préférée de Quentin Tarantino.

Phenomena
Mourir au travers d'une vitre ou un miroir semble un fétiche pour Dario. Jennifer n'a que deux ans de plus que moi. Comme ma conjointe. Elle m'a toujours plu. Comme ma conjointe. Une jeune fille (Connelly) découvre que son somnanbulsime cache des pouvoirs extra sensoriels. L'anecdote familiale de Noël que raconte Connelly en début de film est une histoire vraie tirée de la vie familiale de Dario Argento. La présence de Donald Pleasance est toujours bon signe, et quand il supporte un accent écossais, il est encore plus marrant. La musique est toujours omniprésente. Plus commerciale cette fois. Motorhead, Bill Wyman des Rolling Stones, Iron Maiden. Mais les claviers sont encore au garde-à-vous. Les cris aussi. Les interactions entre adolescents sont tordantes. Irréalistes. Si les rôles adultes sont parfois mal joués(moins ici) imaginez les ados!
Ce film sera le dernier d'Argento à obtenir une digne sortie en salle aux États-Unis. La première heure prend un temps fou à nous happer d'intérêt, on cherche le phénomène. J'ai compris pourquoi je n'en gardais pas souvenir. Mais on bascule dans le trouble pour le dernier 40 minutes. La scène des mouches est fameuse. Les scènes sans dialogues sont toujours les meilleures de Dario Argento. Moins horreur que paranormal. Film préféré d'Argento lui-même.

3 Fois Dario, parce que ça veut faire peur, mais c'est plutôt rigolo.

J'avais besoin de rire la semaine dernière.


* Christian Borromeo
** Mais non...je ne tuais personne,je leur mordais le cou, c'est pas pareil! je fait référence à l'esthétique visuelle des décors de 1982...

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Parce que des enfants pas tellement doués pour l'expression francophone et frôlant la débilité pure se sont infiltrés sur ce site je me vois forcé de modérer les commentaires :)