"J'ai fais mon premier essayage de robe"
C'est la phrase qu'a lancé la fille de la classe afin de (peut-être) se débarrasser d'un élève franchement entreprenant avant que le premier cours ne débute.
Elle, 26 ans(en parait 10 de plus) avait laissé planer le sujet de son mariage prévu pour le 29 juin prochain et l'élève n'avait pas hésité à continuer à vendre sa salade. Il était définitivement en audition. Je lisais Olivier Adam en arrière, nous n'étions que 4, 45 minutes avant le premier cours, et en vérité je lisais perpétuellement le même paragraphe. J'étudiais du coin de l'oeil et de l'oreille, la technique d'outillage de celui qui voulait nouer une amitié avec la brillante, grande et élancée brune qui jasait surtout avec son amie, très petite, Juive-russe mais qui laissait de temps à autres l'impertinent jeune garçon, 23 ans peut-être, s'imposer dans leur conversation.
Je n'aime pas les débuts de session. Celle-ci est ma dernière. Mes souffrances achèvent. Il y a toujours toute une série de visages qu'on a croisé dans d'autres classes et on se sourit maladroitement comme si on se connaissait bien alors qu'on n'a qu'en mémoire la face de l'autre et rien d'autre. Je plonge toujours ma face dans un livre ou sur un ordi. Asocial au possible. Je viens chercher 3 crédits pas des amis. Cette brune, je l'ai eu en ma compagnie dans presque TOUS mes cours. C'est une brillante élève mais c'est fou ce qu'on a rien en commun. Cette discussion sur le mariage avec son amie juive-russe le prouvait encore.
"Ça fait 5 ans que je travaille au même endroit et tout ce qu'on m'a donné c'est un sylo" a dit le garçon.
Personne ne lui avait demandé, pas de détails supplémentaires ne furent demandés non plus, mais il tenait beaucoup à le dire. Les deux filles étaient parties sur les petites bouchées, le D.J. et le photographe de mariage. La grande brune avait visité le salon du mariage et tenait à dire à son amie qu'elle avait trouvé cela éprouvant mais le garçon s'imposait continuellement avec des sujets hors propos.
"Savez vous où est le pavillon Marie-Victorin?"
Les filles le lui ont dit, la brune surtout, qui semble avoir le même type d'assurance dans la voix. Peut-être feraient-ils un bon couple ces deux-là. Elles ont repris leur conversation et le jeune homme a renchérit avec trois autres questions sur le même sujet, les coupant chaque fois. C'était un sujet bien à lui, qui ne considérait les filles en rien, tout comme tout ce qu'il dirait que se rapporterait toujours à sa personne. Toute ses phrase commençaient par moi. C'était malhabile et presque triste à voir. Ça donnait envie de lui donner des cours d'approche des gens.
Les filles étaient très polies. Patientes. Elles ne le lui laissait pas sentir qu'il envahissait leur espace même si tout cela crevait les yeux.
Puis, elles se sont mises à se raconter des anecdotes dites "...dégueulasses..."
"...pis là mon cousin avait mis sa cravate bleue-vierge-marie..."
"...mon oncle, lui, avait pas arrêté de moucher comme un éléphant au mariage de Marie-Flûte..."
C'est là que le garçon a senti qu'il devait à son tour faire son essayage de robe social. Il avait bien tenté par 7 ou 8 fois de s'intégrer au duo de jeunes femmes mais chaque fois, elles avaient proprement répondu, sans jamais offrir de relance. La grande brune tournait même présentement pratiquement son dos complètement au garçon. D'une voix forte, il apporta sa contriubution au monde des anecdoctes, en se disant probablement qu'il devait jouer gros et les faire rire. Il a parlé franchement trop fort et d'une fierté dérangeante qui prouvait qu'il voulait que tout le monde entende puisque les autres élèves arrivaient peu à peu.
"MOI ÇA ME RAPPELLE UNE ANECDOTE DÉGUEU AUSSI, UNE FOIS UNE AMIE PIS MOI ON ALLAIT FAIRE L'AMOUR PIS ELLE AVAIT UNE GOMME. ELLE A MIS LA GOMME DANS UN MOUCHOIR ET A MIS LE MOUCHOIR À CÔTÉ DU LIT SUR UN PETIT MEUBLE. PIS...BEN...ON A FAIT L'AMOUR MAIS QUAND EST VENU LE MOMENT DE S'ESSUYER APRÈS LA RELATION, ELLE A REPRIS LE MÊME MOUCHOIR FALLAIT VOIR TOUT CE QUI ÉTAIT COLLANT ENTRE SES JAMBES..."
(...)
Non.
Fallait pas.
Je ne sais pas si il a dit autre chose. J'étais trop paralysé par son anecdote trop familière, racontée trop fort, trop intime pour trop d'oreilles, trop déplacée. Les images d'inconfort qu'on eu les 8-9 élèves en se tortillant sur leur chaise à l'écoute du punch final qu'il a accompagné d'un grand rire désagréable de nervosité égalaient surement mes images de fromage à pizza qui s'étire. Les murmures ont été constant à partir de ce moment. Les deux filles sont devenues rouges comme des coqueliqots et le garçon n'a jamais semblé remarquer l'inconfort dans lequel il plongeait tout le monde. Un autre élève qu'il connaissait venait d'arriver et ils se sont mis à jaser ensemble par la suite.
Nous devions être au moins 7 pendant ce cours plate, le cours le plus plate de la stratopshère, à quelque fois jeter un regard vers le garçon.
Ne serais-ce que pour vérifier si la robe sociale lui avait fait...
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Parce que des enfants pas tellement doués pour l'expression francophone et frôlant la débilité pure se sont infiltrés sur ce site je me vois forcé de modérer les commentaires :)