dimanche 24 juillet 2016

Nadia Comaneci

J'avais 4 ans. Ma soeur J.J., 3.
Mon autre soeur, Greenjelly était aux couches à 7 mois et demi.
Mon père, 29.
Ma mère, 27.

Nadia avait 14 ans.

Elle était de Roumanie, mais était à Montréal pour le grand rendez-vous olympique.

Avant 1976, il était impossible de donner un 10 en gymnastique. Tellement impossible que la compagnie suisse Omega n'avait jamais conçu d'appareil affichant les pointages des juges pouvant accorder un espace à un tel score. Seulement trois espaces digitaux.

Au jour 2 des compétitions, la gymnaste russe de 17 ans, Olga Kurbut, surnommée le moineau de Minsk, aux barres asymétriques, score un splendide 9.95 (les pointages étant donnés par tranches de .05). Dans les compétitions autre qu'olympiques, la jeune roumaine Nadia Comaneci a toujours été meilleure que sa rivale. Les coéquipière de Kurbut, Ludmilla Tourischeva (19 ans) et l'étoile montante Nelli Kim (14 ans) ont aussi toujours été meilleure que Kurbut. Le tableau ne peut pas afficher plus que 9.95. Kurbut, a alors la marque la plus élevée donnable à une athlète.

Quand la jeune Nadia se présente à son tour pour son épreuve aux barres asymétriques, elle est tout simplement parfaite. Si parfaite que les juges n'on pas d'autre choix que de lui accorder un parfait 10. Mais ils ne peuvent l'afficher. Ils écrivent donc 1.00 sur le tableau, ce qui fait croire à Comaneci, naïve, qu'elle s'est plantée. Mais elle sait que non, elle ne devrait pas s'être plantée. La confusion est totale. Nelli Kim regarde partout et tourne autour du tableau pour voir si il n'y a pas défectuosité.

Une annonceure doit donc alors expliquer au micro que Nadia Comaneci vient de scorer un parfait dix. La foule se soulève et Nadia vient les saluer. La foule ne dérougit pas, il s'agit d'une première historique. Nadia revient pour un rappel de salut. Elle ne comprend pas complètement qu'elle vient de marquer l'histoire olympique.

Avec la complicité de juges particulièrement enthousiastes, il faut le dire car par la suite, Comaneci obtiendra 3 autres 10 aux barres et 3 autres à la poutre.

Nelli Kim aura pour sa part deux 10, un au programme libre au sol et un autre au saut de cheval. L'entraîneur de Comaneci, ayant fui la Roumaine pour les États-Unis au début des années 80. sera l'entraîneur de Mary Lou Retton aux Olympiques de Los Angeles en 1984. Celle-ci obtiendra aussi deux 10, un au saut de cheval et l'autre au programme au sol.

L'adorable Nadia est faite reine très rapidement, Elle raflera trois médailles d'or aux barres et à la poutre. L'équipe de la Roumanie baisse pavillon devant la trop forte (et tricheuse?...)  Russie et partira avec la médaille d'argent. Comaneci gagne aussi la médaille de bronze pour la gymnastique au sol.

Seule Retton (par nostalgie et patriotisme disons-le) et la roumaine Daniela Silivas en 1988 à Séoul ont réussi à obtenir des 10 chez les femmes par la suite.

Les images de Comaneci inspirent le monde entier.

Elle devient en 1976 la BBC personality of the year dans la catégorie athlète. L'Associated Press la nomme athlète féminine de l'année. De retour chez elle, elle est accueillie en superhéros et reçoit toute sorte d'honneurs du despote Nicolae Ceausescu.

En 1977, elle compétitionne à travers le monde, mais comme elle ne reçoit plus de 10, Ceausescu pète un plomb et ordonne à l'équipe Roumaine de revenir à domicile avant la fin des compétitions.

Mais elle revient l'année suivante et, contre l'avis des médecins qui ne veulent pas qu'elle aggrave une blessure au poignet, donne une première médaille d'or d'équipe à son pays en en gagnant une elle-même à la poutre avec un score de 9.95.

Aux Olympiques de Moscou, elle gagne une médaille d'or au cheval d'arçon et aux exercices au sol et deux autres médailles d'argent. À Bucarest l'année suivante, elle revient avec 5 médailles d'or.

Quand son entraîneur fuit le pays en 1981, elle est étroitement surveillée par le gouvernement. On lui permet de se rendre aux Olympiques de 1984, comme ambassadrice roumaine (elle ne compétitionne plus) mais on la chaperonne jour et nuit. Elle a 23 ans. On l'implique dans la gymnastique roumaine, où elle est entraineure. Mais la vie est étouffante. On la surveille en tout temps.

Un mois avant la révolution roumaine, fin novembre, Nadia fuit son pays d'abord pour la Hongrie, puis l'Autriche et finalement les États-Unis.

L'arrivée de reine Nadia en 1989 est controversée car elle semble sous le contrôle d'un auto-proclamé gérant. Il s'agit d'un homme marié et père de 4 enfants, qui a tout laissé derrière et qui semble profiter d'elle à tous les niveaux.

Son ancien entraineur la désemprisonne de l'emprise de ce profiteur et lui arrange une vie à Montréal. Ville qui l'avait fait naître partout dans le monde.

Elle y restera peu de temps car le gymnaste olympique Bart Conner, qui a lui aussi obtenu un trois 10 aux Olympiques de Los Angeles, et qui a rencontré Nadia en 1976 quand ils étaient tous adolescents, lui propose de la revoir, chez lui, en Oklahoma. Ils tombent tous deux amoureux vers 1993 et s'épousent en Roumanie dans un mariage télévisé et hautement publicisé en 1996.

10 ans plus tard, le couple a son premier enfant, un fils.

Entretemps, elle a écrit un livre sur ses correspondances au travers des années.

Les États-Unis la font citoyenne et on lui offre un poste au consul des relations Étatsuno-Roumaines.  
   
Elle reçoit l'ordre du mérite légendaire olympique deux fois, est la seule à avoir eu un tel honneur et la plus jeune à recevoir l'ordre.

On a changé les règles de pointage depuis et un 10 ne serait plus accordable. Ce qui rend le moment encore plus unique.

Son exploit se classe facilement dans les meilleurs moments sportifs féminins mondiaux à vie.

Lundi dernier marquait le 40ème anniversaire de la découverte de son talent à Montréal, un dimanche historique de juillet.

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